Headcanon – En défense de Charlie Weasley, icône asexuelle.

TW : Queerphobie – cet article évoque une attaque de J.K. Rowling envers les personnes asexuelles.

Depuis longtemps, les fans de Harry Potter se sont reconnus dans certains personnages de la saga et les ont parfois utilisé comme exemples pour expliquer leur ressenti à d’autres fans. Le fandom regorge de headcanons et d’interprétations qui intègrent la communauté LGBTQIA+ au monde magique, sur base des sous-textes et des non-dits dans les livres.

Quand on parle de personnages « codés queers, » on pense souvent à l’homosexualité. Cependant, d’autres identités de la communauté LGBTQIA+ (Lesbiennes, Gays, Bisexuel.le.s, Transgenres, Queer, Intersexes, Asexuel.le.s et plus) se sont parfois retrouvées dans les descriptions des livres. C’est notamment le cas de Charlie Weasley, devenu pour certains une icône asexuelle.

L’asexualité, c’est quoi ?

Comme son nom l’indique, l’asexualité est l’absence, totale ou importante, d’attirance sexuelle. Elle est reconnue comme une orientation sexuelle à part entière depuis 2017, qui concernerait 1 à 4% de la population, mais elle est évoquée dès 1886 par les sexologues ! En France, l’enquête 2024 sur la sexualité des français de l’IFOP évoque le chiffre de 12% de la population qui se déclarent asexuelles. Les personnes asexuelles peuvent ressentir une attirance romantique (de nature hétéroromantique, homoromantique ou biromantique) sans pour autant ressentir d’attirance sexuelle. Ce n’est pas lié à une absence ou faiblesse de libido, qui n’est qu’une réaction physiologique du corps, indépendante de l’attirance.

Étant donné le peu de représentation de personnes asexuelles dans le paysage culturel et médiatique, les personnes asexuelles se sentent parfois isolées, incomprises, ou peuvent penser qu’elles ont « un problème« … La méconnaissance de cette orientation les expose à des moqueries, des pressions et, malheureusement, le risque d’agressions motivées par la volonté de les « guérir« .

Dans un article publié sur Mugglenet en 2015 et intitulé Asexual Awareness: Protect Charlie Weasley at All Costs (Sensibilisation à l’asexualité : protégeons Charlie Weasley à tout prix), Shannen Michaelsen écrit :

Avant de réaliser que l’asexualité existait, je pensais que tout le monde surjouait le fait d’avoir un crush. C’est ce que pensent beaucoup d’asexuels ! Mais d’autres n’ont pas une expérience aussi facile. Iels sont isolé.e.s et moqué.e.s ; iels ont l’impression que quelque chose ne va pas chez elleux. Il faut souvent attendre longtemps avant de réaliser qu’iels ne sont pas « cassé.e.s », qu’il existe d’autres personnes comme elles. Si cette prise de conscience est si difficile, c’est en partie parce qu’il y a peu, voire pas, de représentation.

Shannen Michaelsen

Quid de Charlie Weasley ?

C’est donc là que Charlie Weasley entre en jeu. Bien qu’on en sache très peu sur le personnage, il y a bien un fait dont on est certain : on ne lui connaît aucune relation amoureuse. En 2007, alors que la saga s’achève tout juste et que J.K. Rowling dévoile des informations sur la vie des personnages après Les Reliques de la Mort, l’autrice affirme même :

Charlie n’a pas d’enfants. Il ne s’est pas marié. Je ne pense pas qu’il soit gay ; il est juste plus intéressé par les dragons que par les femmes.

Documentaire Une année dans la vie de J.K. Rowling

Cette aveu a fait du puiné Weasley une icône de la communauté asexuelle, aux yeux de certaines personnes concernées. Son exemple leur a permis de mettre des mots sur leur ressenti : ils préfèrent les dragons. C’est tout. Charlie est heureux, et les personnes asexuelles peuvent aussi être épanouies.

Une attaque gratuite sidérante

Jusque là, tout allait bien. Mais c’était sans compter sur un tweet de J.K Rowling, sorti de nulle part le 6 avril 2025, lors de la journée internationale de l’asexualité. L’autrice a ainsi partagé un visuel (ci-dessous), créé par une association LGBTQIA+ célébrant cette journée et expliquant ce qu’est l’asexualité… accompagné d’un texte tout simplement méprisant (sous spoiler) :

« Joyeuse journée internationale de la fausse oppression à toutes celles et ceux qui veulent informer des inconnus qu’ils n’aiment pas tirer leur coup.« 

La formulation vulgaire utilisée par l’autrice ne laisse aucun doute sur ses intentions blessantes. La publication qu’elle partage ne parle nulle part d’oppression : elle informe, elle éduque, elle donne de la visibilité pour que des personnes éventuellement concernées ne se sentent pas seules et puisse mettre des mots sur ce qu’elles ressentent.

Qui a un problème avec ça ? Qui a un problème avec le fait que certaines personnes ressentent les choses différemment, au point d’avoir le besoin irrépressible de chercher à les attaquer publiquement ? La transphobie ne lui suffisait pas ? Va-t-elle tweeter pour la journée internationale des animaux de compagnie que c’est « la journée de fausse oppression pour toutes les personnes qui veulent qu’on sache qu’elles ont un chien » ?

Le fandom vaut mieux que ça

Cette énième sortie illustre (une nouvelle fois) à quel point Rowling s’est éloignée des valeurs de tolérance et de respect prônées par sa saga. Elle a décidé d’utiliser sa célébrité pour agresser publiquement des personnes qui ne lui ont, littéralement, rien fait ! Il n’y a ici aucune prétendue excuse de vouloir « défendre les femmes«  ; uniquement une volonté de rabaisser, dénigrer, mépriser. Rowling est devenue un simple Troll. Et il y a des gens qui aiment les Trolls sur internet, c’est certain ; quel plaisir de causer de la peine, de la colère, à de parfaits inconnus… on se sent vivre quand on fait ça, hein ?

Mais est-ce que les héros de la saga Harry Potter adopteraient ce comportement ? Luna Lovegood ? Ginny Weasley ? Hermione ? Dobby ? Hagrid ? Ces personnages au grand cœur qui nous rappellent sans cesse que la différence n’est pas notre ennemi ? Ou est-ce plutôt là l’attitude de Malefoy, Crabbe et Goyle ?

De nombreux fans passeront à côté de son tweet, ou préfèreront l’ignorer, faire comme si de rien n’était. Une nouvelle fois, il s’agit de choisir entre le bien… et la facilité. C’est facile de mettre ses œillères. Il faut plus de courage pour affronter ses amis, ou les personnes que l’on respecte… que l’on a respecté, il fut un temps. Il est l’heure de faire preuve de ce courage. D’ouvrir les yeux et de dénoncer ce comportement de petit caïd de cours de récréation.

Parce que vous valez, nous valons, mieux que ça. Les personnes asexuelles ont le droit d’être mieux comprises ; de se sentir aimées comme elles sont ; de vivre sans être confrontées à des préjugés dépassés ; et d’être laissées tranquilles avec leurs dragons. Charlie Weasley mérite mieux que ça.

Sources : Mugglenet, Wikipedia, radiofrance, Council of Geeks
Illustration en tête d’article : fanart par kaenith