Puissance et allégeance : la baguette de Voldemort

Ce n’est un secret pour personne, la baguette est un élément essentiel du monde magique. Sans elle, difficile de lancer un sort et il en existe autant de sortes que de sorciers. Tout le monde connait la Baguette de Sureau, mais nous allons intéresser à un artéfact, tout aussi célèbre : celle de Voldemort.

Au service de son maître

En bois d’if, avec une plume de phénix à l’intérieur et mesurant 33,75 centimètres, Tom Jedusor a toujours utilisé la même baguette depuis son entrée à Poudlard. C’est avec cette dernière qu’il commet ses premiers meurtres, jusqu’à ce que Peter Pettigrow la récupère.

Ainsi, de 1981 jusqu’à la résurrection de Voldemort en 1995, Pettigrow possédait la baguette de son maître et a commis des actes réputés impossibles pour un sorcier de son rang. Dans un article écrit en 2004, un rédacteur de MuggleNet, nous donne quelques explications :

Peter Pettigrow est un mystère, enveloppé dans une devinette, à l’intérieur d’une énigme. Un point qui m’a toujours dérangé est le moment où Sirius a coincé Pettigrow et qu’il a fait exploser la rue. McGonagall le décrit comme « désespéré en duel » et « n'[ayant] jamais été dans la ligue [de James et Sirius] en termes de talent ». Alors comment a-t-il fait exploser une rue et tué douze personnes ? Comment quelqu’un d’aussi inepte a-t-il pu assassiner [Cedric Diggory] avec l’Avada Kedavra, un sort qui nécessite « une puissante dose de magie » ?
La réponse est : avec la baguette de Voldemort.

Brandon Ford, The Underground Lake #2, 2004

De grands pouvoirs pour un petit rat

Le fait qu’une personne constamment décrite comme sans talent ait fait preuve d’une magie aussi puissante est un peu difficile à croire. De ce que l’on sait, cette explosion est l’unique exemple de décès multiples résultant d’un seul sort. Cependant, le rédacteur était limité par le fait que tous les livres n’étaient pas encore publiés à l’époque où il a rédigé cet article, puisque l’Ordre du Phénix venait de sortir.
Nous avions seulement vu Queudver brandir la baguette de Voldemort dans le cimetière, car par la suite, il était totalement absent du tome 5.

Et les faits sont là : après que Pettigrow a renoncé à la baguette d’if, il n’a plus jamais jeté un seul sort dans les livres suivants et n’apparait que dans trois chapitres seulement :

• L’impasse du Tisseur (Le Prince de sang-mêlé, chapitre 2)
• L’ascension du Seigneur des Ténèbres (Les Reliques de la Mort, chapitre 1)
• Le manoir des Malefoy (Les Reliques de la Mort, chapitre 23)

Nous ne voyons pas Pettigrow faire de magie dans ces passages, mais nous savons qu’Ollivander lui a fabriqué une nouvelle baguette, comme il le raconte plus tard au trio à la Chaumière aux Coquillages. Si l’on se fie à ces constatations, les capacités magiques de Pettigrow proviennent bien de l’utilisation de la baguette de Voldemort. En effet, il n’a plus la baguette de son maitre en sa possession après la résurrection de ce dernier et ne fait plus de démonstration de magie inhabituellement puissante.

Le cas de la Baguette de Sureau

Cependant, le fait que Pettigrow soit un meilleur sorcier avec une baguette qui n’est pas la sienne, remet en cause tout ce que l’on sait sur leur fonctionnement. Ollivander affirme que l’on « n’obtiendra jamais d’aussi bons résultats avec la baguette d’un autre sorcier ».

Une grande partie de l’intrigue des Reliques de la Mort repose sur l’idée que l’utilisation d’une baguette que l’on ne maîtrise pas rend difficile l’exercice de la magie, et Pettigrow n’était pas maître de la baguette d’if lorsqu’il a pratiqué la magie avec.

Cela permet également de mettre en perspective la puissance de la Baguette de Sureau. Dans ses commentaires dans Les Contes de Beedle le Barde, Dumbledore affirme que : « ceux qui connaissent bien la tradition des baguettes magiques seront d’accord pour dire que les baguettes s’imprègnent véritablement des talents de ceux qui les utilisent, bien qu’il s’agisse là d’un processus imprévisible et très imparfait. » De plus, une « baguette qui serait passée entre les mains de nombreux mages noirs aurait vraisemblablement, et à tout le moins, un penchant marqué pour les types de magie les plus dangereux. »

Si l’on s’appuie sur les dires de Dumbledore, les baguettes s’imprègnent du talent de leurs propriétaires, donc après quarante ans de collaboration avec Voldemort, sa baguette est devenu si puissante qu’elle a fait de Peter Pettigrow un formidable sorcier. Ainsi, grâce à la puissance disproportionnée de la baguette, Queudver a été capable de produire une magie plus puissante, avec un outil qui n’est pas le sien.

Maintenant que nous savons que la baguette de Voldemort est extrêmement puissante, il est temps de la traquer dans les livres.

Un choix pas si curieux

Selon les règles du monde magique, lorsqu’un sorcier en vainc un autre, il maîtrise la baguette de ce dernier. Bien que la question de savoir ce qui constitue une défaite soit obscure, la saga s’ouvre sur un échec sans équivoque : celle de Voldemort contre le petit Harry. Ce qui signifie que Harry était le maître de la baguette de Voldemort dès l’âge d’un an.

Dix ans plus tard, l’adolescent se retrouve dans la boutique d’Ollivander, à la recherche d’une baguette qui le choisira. Comme nous le savons tous, c’est la jumelle de celle de Voldemort qui finit par le choisir, ce qu’Ollivander trouve « curieux… très curieux… ».
Mais il existe deux très bonnes raisons pour que cette baguette ait désigné Harry.

Premièrement, il possédait un morceau de l’âme de Voldemort en lui. Si la baguette de houx a ressenti un lien de parenté avec Tom Jedusor, il est logique qu’elle choisisse également ce dernier comme sorcier. La baguette a fait un choix similaire à celle de sa jumelle, en détectant la présence du maître de cette dernière en Harry.

Deuxièmement, Harry est également le maître de la baguette en bois d’if puisque, comme nous l’avons indiqué plus haut, il a vaincu Voldemort à l’âge d’un an. La baguette de houx a donc reconnu en Harry le maître de sa jumelle. Bien que nous ne sachions pas quel impact cela aurait sur le choix d’un sorcier par une baguette, c’est certainement un facteur.

Ainsi, quand Harry saisit la baguette de houx, la baguette reconnaît à la fois le choix initial de sa jumelle et son maître actuel. Il n’est donc pas étonnant qu’elle se révèle à Harry pour être à son service ! Ce n’est pas le destin, c’est la tradition de la baguette ! Cela renforce également l’argument selon lequel les destins de Voldemort et Harry étaient liés.

Le dilemme du duel au cimetière de Little Hangleton

Les choses se compliquent lorsque Harry est envoyé au cimetière de Little Hangleton via un Portoloin, pour assister à la renaissance du Seigneur des Ténèbres, dans le 4e tome. Au départ, Harry est toujours le maître des deux baguettes aux plumes de phénix. Mais avant que le Priori Incantatem n’ait lieu, il est fort probable que les allégeances des baguettes aient changé.

Pour y voir plus clair, tournons nous vers les propos de J.K. Rowling, qui s’est exprimée à ce sujet sur PotterCast en 2007 :

On m’a souvent demandé ce qu’il en était du Club de Duel, etc.
Eh bien, je pense qu’il est clair que dans la pratique, lorsqu’il s’agit uniquement d’amusement ou de compétition, qu’il n’y a pas de signification émotionnelle, une baguette ne change pas d’allégeance. Mais il y a des situations dans lesquelles l’état émotionnel des sorciers… où beaucoup de choses dépendent d’un duel, c’est différent. Il s’agit d’un pouvoir réel et d’un transfert qui aura des effets considérables dans certains cas. Je pense donc que la baguette se comportera différemment à ce moment-là.

J.K. Rowling, PotterCast, 2007

D’abord, il est possible que ce que Pettigrow a fait à Harry soit considéré comme une défaite. Il ne s’agit pas d’un jeu ou d’un entraînement, mais bien d’une question de vie ou de mort. Il attache Harry contre une pierre tombale, le frappe et lui entaille le bras pour lui prélever du sang. Harry semble vaincu après tout cela, ce qui ferait de Queudver le maître des deux baguettes pendant un bref moment.

La ligne de succession

Cependant, si Queudver est devenu maître des baguettes, il a tout de suite été vaincu par Voldemort. Après avoir revêtu sa robe de sorcier, il « en sortit une baguette magique. Il la caressa doucement, la leva et la pointa sur Queudver qui fut soulevé du sol et projeté contre la pierre tombale à laquelle Harry était attaché » ; « il s’effondra par terre et resta là, recroquevillé, gémissant. »
Une fois de plus, il est difficile de savoir ce que signifie exactement vaincre dans ce contexte. Pettigrow a plaqué Harry contre une pierre tombale et l’a humilié ; Voldemort, quant à lui, a répété ces mêmes actions avec Queudver. En prétendant que Pettigrow aurait vaincu Harry, nous devons également en conclure que Voldemort a vaincu Pettigrow à son tour. Cela ferait de Voldemort le maître des deux baguettes.

Cependant, il est également possible que Pettigrow n’ait jamais fait partie de la ligne de succession. Étant donné qu’il ne faisait qu’exécuter des ordres, c’est peut-être Voldemort qui a vaincu Harry directement. Après tout, prendre de force le sang de Harry pour renaître est bien être l’œuvre de Voldemort. Il s’agit d’une question à clarifier : l’allégeance des baguettes tient-elle compte de celui qui mène la barque ?
D’autant plus que nous savons qu’une baguette ne peut pas se retourner contre son maître légitime, donc si Pettigrow était véritablement le maître de la baguette d’if, Voldemort n’aurait pas pu l’attaquer.

Quoi qu’il en soit, que Queudver soit ou non un maître intermédiaire des baguettes jumelles, même l’espace d’une seconde, Voldemort finit par être le maître des deux baguettes au moment où il convoque les Mangemorts.

Et c’est ici que nous laissons les faits de côté pour deviner ce qui s’est passé ensuite.

Le propriétaire légitime

Comme rien n’indique que Harry ou Voldemort ait eu des difficultés avec leur baguette après le Priori Incantatum, nous devons supposer que l’allégeance commune des deux baguettes s’est séparée à un moment donné dans le cimetière et est revenue respectivement à Harry et Voldemort.

Une allégeance incertaine

Pourtant, nous ne disposons pas d’informations fiables sur la façon dont Harry et Voldemort se jettent des sorts dans cette scène. Harry ne lance pas un seul sort avant le charme de désarmement qui a activé Priori Incantatum. Voldemort vient de retrouver son corps et lance des sorts correctement pour la première fois depuis des années (sans compter que l’action est rapide et que les émotions sont exacerbées). Ni l’un ni l’autre n’est en mesure de percevoir que sa baguette est déréglée.

En analysant les données dont nous disposons, nous constatons que Voldemort jette sept sorts avant la malédiction mortelle qui a activé Priori Incantatum :

• Doloris (sur Avery)
• La création de la main d’argent de Pettigrow
• Doloris sur Harry, encore attaché à la stèle de Tom Jedusor Sr.
  (La Coupe de Feu, chapitre 33 : Les Mangemorts)
• Imperium (informulé) pour forcer Harry à s’incliner
• Doloris lors de son duel contre Harry
• Imperium, contré par Harry
• Doloris, esquivé par Harry
  (La Coupe de Feu, chapitre 34 : Priori Incantatum)

Rien ici n’est d’une grande utilité pour déterminer si Voldemort est à la hauteur de ses performances habituelles. Comme nous l’avons établi, sa baguette est un outil exceptionnellement puissant, quelle que soit la personne qui la manie, et Voldemort l’est davantage. Nous pouvons donc supposer que les sortilèges Endoloris lancés par Voldemort étaient puissants, mais comme c’est la première fois qu’Harry en subit un, nous n’avons pas d’éléments de comparaisons. Il en va de même quand il le force à s’incliner — une magie simple qui ne nécessite pas la maîtrise d’une baguette.

En ce qui concerne le sortilège d’Imperium, nous manquons encore une fois de contexte. Nous savons qu’Harry est doué pour le repousser, et nous savons que Voldemort lance probablement un maléfice d’Imperium très violent. Nous ne pouvons donc pas vraiment juger de la rapidité d’Harry à le repousser. De plus, en raison de son aptitude à résister à l’Imperium, personne n’essaiera plus jamais de le lancer contre lui.

La seule information concrète que nous avons est la main d’argent de Pettigrow, il est probable que Voldemort était encore le maître des deux baguettes quand il l’a créée.

Redevenir le maître

Il semble qu’il y ait deux possibilités pour expliquer comment Harry est redevenu le maître de sa baguette. D’abord, il l’a récupérée lorsque Voldemort lui a rendu pour qu’il puisse se donner en spectacle devant ses Mangemorts : « Mais je vais quand même lui donner sa chance. Il aura le droit de combattre et vous saurez alors lequel de nous deux est le plus fort. […] À présent, détache-le, Queudver, et rends-lui sa baguette magique. »

C’est peut-être un moyen de renoncer volontairement à la maîtrise d’une baguette : en la rendant à son propriétaire, quand on a le dessus. Si les baguettes sont suffisamment sensibles pour suivre les sorciers qui se battent entre eux, il est tout à fait possible qu’elles soient également conscientes des legs. Comme le dit Ollivander, « des lois subtiles régissent la propriété des baguettes ». Cela peut également expliquer pourquoi les capacités magiques de Ron n’ont pas changé de manière significative lorsqu’il a échangé une baguette héritée contre une baguette qui l’a choisi.

L’autre possibilité est que le Priori Incantatum agisse comme un bouton de réinitialisation géant concernant les allégeances des baguettes. Il est plausible que lorsque le sort s’est produit, l’allégeance de chaque baguette soit revenue au sorcier qui l’utilisait à ce moment-là.

Pour clarifier : on parle beaucoup de la baguette de Harry battant la baguette de Voldemort pendant le Priori Incantatem. Mais il faut bien différencier cet évènement de la victoire de Harry sur Voldemort : il ne s’agissait pas vraiment d’un duel physique entre Harry et Voldemort, mais d’un duel de volonté entre les sorciers et les baguettes.

De main en main, le chemin de la baguette d’if

Quoi qu’il en soit, après que Harry se fut échappé du cimetière, lui et Voldemort sont tous deux maîtres de leur propre baguette.
Selon toutes ces informations nous pouvons retracer la chaîne de propriété de la baguette de Voldemort :

Voldemort → Harry → Queudver ? → Voldemort

Ainsi que de celle de Harry :

Harry → Queudver ? → Voldemort → Harry

Cela montre également que les deux baguettes, « faisant écho à la relation entre leurs maîtres », étaient liées plus étroitement que n’importe quelles autres baguettes. En plus de partager un noyau, elles ont partagé un maître pendant quatorze ans. Puis elles se sont liées via le Priori Incantatem, où la baguette de houx a maîtrisé sa jumelle et « s’est imprégnée d’une partie de la puissance et des qualités » de l’if.

En plus de cette connexion, chacun des deux maîtres des baguettes avaient une part de l’autre en lui : Harry avec l’horcruxe et Voldemort avec le sang de Lily.

Conclusion

En fin de compte, nous pouvons nous poser une question : qu’est-il arrivé à la baguette de Voldemort ? Il cesse de l’utiliser lorsqu’il obtient la Baguette de Sureau, mais rien ne nous indique ce qu’il en fait. Nous savons qu’il est plutôt friand d’artefacts magiques puissants, il est donc peu probable qu’il s’en débarrasse.

Après sa défaite ultime, sa baguette originale est introuvable. Harry décide d’enterrer la Baguette de Sureau avec Dumbledore, et de briser ainsi son pouvoir. Mais si les baguettes « s’imprègnent véritablement des talents de ceux qui les utilisent », il existe une autre baguette très dangereuse… une baguette qui a appartenu à Voldemort pendant un demi-siècle et créé six horcruxes, et qui a même fait de Peter Pettigrow un dur à cuire.

Et vous, quelles sont vos théories ?

Références : MuggleNet, Les Contes de Beedle le Barde, Pottermore