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Au cœur des baguettes, l’histoire des Malefoy

Les baguettes revêtent une grande importance pour les sorciers. C’est à travers elles que s’exprime leur magie : elles en sont le vecteur, le canal, le prolongement mais, comme Ollivander le dit si bien, elles sont bien plus que ça encore :

« C’est la baguette qui choisit son sorcier […] Une attirance de départ, puis la recherche mutuelle d’une certaine expérience, la baguette apprenant du sorcier tout comme le sorcier apprend de la baguette. »

Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 24 (“Le fabricant de baguettes”).

Une dialectique s’opère dès lors entre le sorcier et sa baguette : ils vont évoluer ensemble, s’influencer mutuellement. Bien plus qu’une dialectique, c’est même une vraie relation qui les unit.

Du point de vue du récit, les baguettes jouent ainsi un grand rôle dans la caractérisation des personnages et font même partie de leur identité. Elles peuvent également s’avérer un élément central de l’intrigue, une part importante dans la construction de l’histoire. C’est évidemment le cas de la baguette de Sureau ou encore des baguettes de Harry et Voldemort qui, par leur composition quasi-semblable et le fait qu’elles s’opposent pourtant farouchement l’une à l’autre, sont extrêmement porteuses de sens.

De manière moins évidente peut-être (quoique ?), d’autres baguettes, à d’autres moments ont, elles aussi, de par leur parcours, leur composition ou leur (changement d’) allégeance, raconté un bout d’histoire…

La déchéance des Malefoy, une histoire de baguettes ?

« Voyons… Lucius, je ne vois pas pourquoi tu aurais encore besoin d’une baguette magique. »

Voldemort à Lucius dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1 (“L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

« — C’est ma baguette que tu as là, Potter, dit Malefoy […]
— Ce n’est plus la tienne, répliqua Harry, […]
»

Dialogue entre Harry et Drago dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 31 (“La bataille de Poudlard”).

Père et fils ont en commun d’avoir perdu leur baguette au profit d’un autre sorcier : Harry pour Drago et Voldemort pour Lucius, autrement dit les figures de proue respectives des deux camps s’opposant dans la guerre.

Ces deux micro-événements jouent selon moi un rôle plus important qu’il y paraît. Sur le plan diégétique, ils influencent le cours et l’issue de la guerre. Sur le plan extradiégétique, ils participent à l’évolution de plusieurs personnages (Lucius et Drago, bien sûr, mais aussi Harry et Voldemort), altérant à la fois leur personnalité et leurs relations (Lucius avec Drago et Voldemort, Drago avec Harry et Harry avec Voldemort).

La baguette de Lucius

Baguette de Lucius Malefoy.
Baguette de Lucius Malefoy.
© Harry Potter Shop

« — Qu’est-ce que c’est ?
— De l’orme, Maître, murmura Malefoy.
— Et à l’intérieur ?
— Du dragon… du ventricule de dragon.
»

Dialogue entre Voldemort et Lucius dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1 (“L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

Si l’on se fie au savoir-faire d’Ollivander, l’orme est le bois qui engendre le moins d’accidents. Il fait généralement des baguettes très sophistiquées, capables d’une magie avancée, soignée et élégante, en tous cas dans les mains d’un sorcier digne et habile.

Tous ces adjectifs semblent parfaitement définir un homme tel que Lucius ! D’ailleurs, la rumeur prétend que seul un sorcier au sang pur peut être choisi par une baguette en bois d’orme. Cette croyance est cependant infondée : selon Ollivander, les sangs purs aiment simplement s’attribuer et s’approprier les caractéristiques de l’orme.

Le ventricule de dragon, très capricieux et donc sujet aux accidents, tempère un peu ce grand potentiel. Ce noyau est aussi le plus prompt à verser dans la magie noire. La baguette ne le fera pas d’elle-même pour autant, mais, si elle est utilisée pour lancer des sortilèges issus des forces du Mal, son cœur le lui permettra en tous cas sans problème, et même avec talent.

En règle générale, le ventricule de dragon confère à la baguette — et donc à son sorcier — une grande puissance et une rapidité d’apprentissage. Il implique aussi une certaine loyauté en ce sens que, dans le cas où la baguette changerait d’allégeance après avoir été gagnée par un autre sorcier, elle conserverait néanmoins un lien particulier avec son maître d’origine.

Dans le cas de Lucius, il est possible que cette loyauté soit encore renforcée par une transmission familiale — de père en fils dont sa baguette ferait l’objet depuis des siècles. Ce fait n’est pas avéré mais, s’il est vrai, la propriété et le destin de la baguette n’en deviennent que plus significatifs. Elle serait alors un héritage, un flambeau laissé de génération en génération au chef de la famille Malefoy, autrement dit un symbole de la lignée et de sa grandeur.

Une perte symbolique …

« Ta baguette, Lucius. J’exige que tu me donnes ta baguette. »

Voldemort à Lucius dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1 (“L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

Lors de la réunion des Mangemorts au Manoir Malefoy (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1, “L’ascension du Seigneur des Ténèbres”), Voldemort explique qu’il lui faut une autre baguette que la sienne pour parvenir à tuer Harry Potter. Aucun volontaire ne se présente, ce qui peut sembler étrange de prime abord : pourquoi les partisans du Seigneur des Ténèbres n’y voient-ils pas tous une occasion on ne peut plus honorable de servir leur maître ? Parce qu’ils sont tous, en tant que sorciers, profondément liés et attachés à leur baguette, qui est à part entière un élément intime de leur identité. Voldemort « aurait pu tout aussi bien leur annoncer qu’il voulait leur emprunter un bras » (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1, “L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

Face au silence de l’assemblée, Voldemort interpelle donc Malefoy père, déjà en disgrâce après l’échec de la bataille au Ministère :

« Lucius, je ne vois pas pourquoi tu aurais encore besoin d’une baguette magique. »

Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1 (“L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

Le sous-entendu est déjà très humiliant, surtout qu’il vient juste après que la baguette a été comparée à un membre du corps humain. Lucius se résout malgré tout à offrir sa baguette à son maître, même s’il pense dans un premier temps recevoir la sienne en retour. Seconde vague d’humiliation :

« Te donner ma baguette, Lucius ? Ma baguette ? »

Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 1 (“L’ascension du Seigneur des Ténèbres”).

Tout le monde ricane. Bien sûr, on ne donne pas sa baguette, encore moins quand on est le Seigneur des Ténèbres ! Cela revient à se désarmer soi-même, à perdre ce qui fait de nous un sorcier, à se soumettre à une situation de vulnérabilité et de faiblesse, bref, à perdre un bras, pour garder encore la même comparaison.

Voldemort prenant la baguette de Lucius.
Voldemort prenant la baguette de Lucius.
© Harry Potter et les Reliques de la Mort (Première Partie)

Dans le film, Voldemort enfonce encore un peu plus Lucius en détachant la tête de serpent servant de manche à sa baguette. Cet ornement (ainsi que la canne dans laquelle est cachée la baguette, absente des livres, mais visible dans les films), faisant supposément partie de l’héritage familial, doit être lui-même d’une grande valeur sentimentale pour Lucius. Rappelant son appartenance (ainsi que celle de toute sa famille) à la maison Serpentard mais aussi sa richesse et le rôle de patriarche dont il a hérité et qu’il est tenu d’honorer, la décoration méprisée et jetée par la main de Voldemort sur la table de leur demeure dit à quel point Lucius a perdu la reconnaissance de ses pairs et surtout de son maître. À travers ce geste et cet événement, c’est son nom et sa réputation qui sont salis.

… et lourde de conséquences

Lucius n’a pas réellement été désarmé : il a consenti à céder sa baguette, sous la pression et la peur bien évidemment. Il est alors humilié à la fois en tant que chef d’une famille jusque-là respectée et puissante, et en tant que sorcier. Il se met également en danger pour la guerre qu’il sait à venir, puisqu’il se retrouve démuni de son principal moyen de faire de la magie. Par ce fait, il paraît également évincé en tant que Mangemort puisqu’il ne pourra prendre activement part au combat.

Toutefois, on peut supposer que, si Voldemort était bel et bien parvenu à tuer Harry grâce à la baguette de Lucius, cela aurait pu (aurait dû ?) le rendre fier. Indirectement, il aurait participé à la victoire du Mage noir sur Harry Potter.

Seulement, voilà : Voldemort échoue. Par un événement magique très rare, la baguette de Harry se souvenant d’avoir déjà été attaquée par la magie de Voldemort et se défendant face à elle, la baguette de Lucius est détruite. Si elle faisait bien l’objet d’un héritage familial, l’issue est d’autant plus dure : sa destruction annonce en quelque sorte la fin des Malefoy, ou en tous cas la fin de leur suprématie et de ce qu’ils ont été jusqu’alors.

Une question demeure néanmoins : qu’en est-il de l’allégeance de la baguette ? A-t-elle considéré que Lucius n’était plus digne d’elle puisque Voldemort est parvenu sans problème à l’utiliser, ou ce dernier est-il suffisamment puissant pour faire plier n’importe quelle baguette — hormis celle de Sureau ? Et si, au contraire, c’était toujours par loyauté à Lucius que sa baguette s’était rangée aux desseins du Seigneur des Ténèbres, exactement comme il l’avait toujours fait lui-même ?

La baguette de Drago

« Bois d’aubépine et crin de licorne. Vingt-cinq centimètres exactement. Relativement souple. »

Ollivander au sujet de la baguette de Drago dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, 24 (“Le fabricant de baguettes”).

L’aubépine est un bois difficile à maîtriser, qui « fait une baguette étrange et contradictoire, aussi pleine de paradoxes que l’arbre qui lui a donné naissance, dont les feuilles et les fleurs guérissent, mais dont les branches coupées sentent la mort » (propos rapportés de Gregorovitch).

Autrement dit, il s’agira d’une baguette aussi douée pour les sortilèges de guérison que pour les malédictions, qui sera faite de cette double nature du Bien et du Mal (bien que la formulation soit très manichéenne). Le propriétaire d’une baguette en bois d’aubépine est dès lors souvent quelqu’un de complexe, en proie à des troubles et conflits intérieurs.

Baguette de Drago Malefoy.
Baguette de Drago Malefoy.
© Harry Potter Fandom

Cependant, comme celle de Lucius, la baguette de Drago trouve un certain équilibre entre son bois et son noyau, le crin de licorne, qui apporte cohérence et constance à la magie de son propriétaire. Plus encore que le ventricule de dragon, le crin de licorne est très attaché à son propriétaire d’origine. Il est moins puissant, mais garantit la plus grande fidélité.

En raison de sa pureté, il complique sérieusement l’inclinaison à la magie noire. Drago n’a visiblement pas rencontré de difficultés à lancer un sortilège impardonnable tel que l’Imperium sur Madame Rosmerta (Harry Potter et le Prince de sang-mêlé, chapitre 27, « La tour frappée par la foudre »), mais certains défenseurs du personnage aiment voir dans la composition de sa baguette une preuve irréfutable qu’en dépit de cela, il n’a et n’aurait jamais pu se résoudre à rejoindre complètement les forces du Mal.

En réalité, la résistance de la baguette face aux magies noires n’empêche pas de lancer ces sortilèges. Le crin de licorne s’abîmera et se détériora simplement sous un tel usage, versant dans ce qu’Ollivander appelle “mélancolie” jusqu’à “mourir” et devoir ainsi être remplacé. En ce sens, un sorcier dont la baguette renferme du crin de licorne pourrait vraisemblablement sombrer dans les forces du Mal, mais sa magie s’en verrait sûrement corrompue et affaiblie.

De la souplesse relative de la baguette (qui se veut correspondre à celle de l’esprit de son sorcier), nous pourrions conclure que Drago, bien qu’affichant un caractère en apparence très affirmé, voire borné par moments, n’en demeure pas moins quelqu’un de très influençable. La longueur quant à elle (indiquant plutôt la force de caractère) se trouve ici dans la moyenne (basse). Étant donné que les divers éléments caractérisant une baguette sont toujours intrinsèquement liés, entre eux et au sorcier qui la possède, on peut supposer que cette “faible” longueur, en l’occurrence, représente un caractère qui ne s’assume pas encore pleinement, car en proie à des conflits.

On sait tout de la baguette de Drago, sinon comment il l’a reçue. À ce sujet, un doute persiste : dans le chapitre 5 de Harry Potter à l’école des sorciers, lorsque Harry rencontre Drago pour la première fois, ce dernier lui dit que sa mère est partie voir les baguettes pour lui. Cela signifie-t-il que Narcissa a elle-même choisi la baguette de son fils ? Ou a-t-elle seulement fait du repérage avant d’y retourner avec lui ?

La seconde hypothèse peut paraître plus probable : une famille de sorciers aussi fiers de l’être que celle des Malefoy n’aurait sans doute pas dérogé à la tradition selon laquelle un sorcier est choisi à onze ans par sa baguette. Cependant, il est aussi possible d’y voir déjà une trace de la surprotection maternelle. Narcissa a peut-être choisi la baguette de Drago : au fond, qui mieux qu’elle sait qui est (ou doit être) son fils ?

Conquise par Harry …

« — […] C’était la baguette de Drago Malefoy.
C’était ? répéta Harry. Elle ne l’est plus ?
Peut-être que non. Si vous l’avez prise…
En effet…
Alors, elle est sans doute à vous. Bien sûr, la manière de s’en emparer a une certaine importance. Beaucoup de choses dépendent également de la baguette elle-même. En général, cependant, quand une baguette a été conquise, elle change d’allégeance. »

Dialogue entre Ollivander et Harry dans Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 24 (“Le fabricant de baguettes”).

C’est au cours de la bataille au Manoir Malefoy (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 23, « Le manoir des Malefoy ») que Harry dérobe la baguette de Drago, en même temps que celles de Bellatrix (que Hermione utilisera) et de Peter Pettigrow (que Ron récupèrera).

S’il choisit d’utiliser celle de Drago, c’est d’abord sans le savoir : « [Harry] ne se souvenait plus, à présent, à qui avaient appartenu ces baguettes. Il se rappelait vaguement les avoir arrachées des mains de quelqu’un » (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 24, “Le fabricant de baguettes”).

Contrairement à son père, Drago n’a pas cédé sa baguette. Il n’a pas non plus été désarmé dans un affrontement sorcier puisque Harry la lui a simplement arrachée des mains et prise de force. Selon Ollivander, cela peut être une façon de conquérir une baguette, et donc d’impacter son allégeance, mais ses explications restent floues. Que signifie vraiment “conquérir” une baguette ? Comment se traduit concrètement cette « certaine importance » de la façon dont on s’en empare ? Est-ce que Harry serait un sorcier assez puissant pour pouvoir utiliser n’importe quelle baguette, comme Ollivander le suggère également ?

Comme toujours, la question de l’allégeance s’annonce très complexe. Quand on se souvient de l’attachement que le crin de licorne développe à l’égard de son propriétaire, il demeure dans tous les cas difficile de croire que la baguette de Drago devient tout bonnement celle de Harry, sans même y opposer un brin de résistance.

Serait-ce alors ce crin de licorne, mourant, car mal utilisé, qui, par instinct de survie, permettrait un revirement de loyauté ? Étrange aussi, à mon sens, car, si Drago a certes fait usage de la magie noire avec sa baguette, risquant ainsi d’en abîmer le cœur, Harry n’est pas en reste ! Il utilise à plusieurs reprises des sortilèges impardonnables : l’Imperium lors de leur passage à Gringotts (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 26, « Gringotts »), et le Doloris lorsqu’il veut se venger de l’élève qui a craché au visage du professeur McGonagall (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 30, « Le renvoi de Severus Rogue »).

Harry arrachant les baguettes des mains de Drago.
Harry arrachant les baguettes des mains de Drago.
© « Harry Potter et les Reliques de la Mort » (Première Partie)

… ou toujours loyale à Drago ?

Quand bien même Harry serait un assez bon sorcier pour pouvoir utiliser une baguette qui ne l’a pas choisi, Ollivander lui-même rappelle que « les meilleurs résultats sont toujours obtenus lorsqu’il existe une forte affinité entre le sorcier et sa baguette [et que] ces connexions sont complexes » ((Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 24, « Le fabricant de baguette »).

Or, il semble que Harry ait de particulièrement bons résultats avec la baguette de Drago :

« Harry regarda la baguette aubépine qui avait jadis appartenu à Drago Malefoy. Il avait été surpris, mais heureux, de découvrir qu’elle travaillait pour lui au moins aussi bien que celle de Hermione l’avait fait. »

Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 24 (“Le fabricant de baguettes”).

Si l’on peut facilement imaginer que la baguette de Hermione, amie loyale et fidèle comme il y en a peu, ait obéi à Harry par simple loyauté à l’égard de sa propriétaire, il est peu probable que la baguette de Drago ait suivi le même raisonnement. Alors, qu’est-ce qui explique qu’elle “travaille” aussi bien pour lui ?

Rappelons que la baguette apprend du sorcier. Est-il ainsi possible que la baguette de Drago se soit pliée à la magie de Harry précisément parce que, restée fidèle à la vraie nature — pas si mauvaise — de Drago, elle a trouvé en Harry un allié inattendu ? Drago ne désirait pas vraiment rejoindre Voldemort et, à ce moment-là de l’histoire, il est plus vraisemblable de supposer qu’il aurait déjà préféré le voir vaincu plutôt que d’être contraint de le suivre. La baguette se serait-elle donc alliée à une magie et à des desseins qui n’étaient, contre toute attente et hormis les apparences, pas si différents de ceux de son propriétaire ?

Selon cette hypothèse, le destin de la baguette pourrait cristalliser le “changement de camp” et l’évolution de la mentalité de Drago. C’est par elle que Harry tue Voldemort : cela pourrait signifier qu’une baguette avec un tel cœur finit toujours par se tourner vers le Bien plutôt que vers le Mal. De même alors, le propriétaire d’une telle baguette, constituée de la même matière, finirait toujours par délaisser le Mal pour revenir vers le Bien.

Et si c’était les deux à la fois ?

Si l’on approfondit cette théorie, il se peut que la baguette d’aubépine ait simplement trouvé en Harry une nature semblable en bien des points à celle de Drago.

Le rapport au Bien et au Mal peut faire partie de ces points communs. Drago ne peut peut-être pas totalement verser dans la magie noire, mais il est en proie à ce conflit entre le Mal et le Bien. Harry n’est pas si différent, surtout en ayant en lui une part de “Mal”, une part de Voldemort.

Par ailleurs, est-il même moins influençable que Drago ? Ses idées sont peut-être meilleures parce qu’en faveur d’un monde tolérant et ouvert, mais il n’hésite pas à suivre Dumbledore les yeux fermés dès son arrivée dans le monde magique. Ayant besoin de repères (et de “re-pères”), il se range très vite aux côtés des autres pour une cause en laquelle on l’a encouragé à croire et peut s’avérer extrêmement borné dans ses opinions (d’ailleurs, Hermione en fait souvent les frais). Drago a un père, certes, mais il a lui aussi énormément de choses à prouver et un grand besoin de reconnaissance et d’attention.

Drago et Harry ne sont pas si différents. Construits en miroir, ils sont chacun le revers d’une même médaille. La baguette d’aubépine a peut-être pu pressentir cela et, en servant d’abord l’un puis l’autre, elle a pu travailler à réunifier cette même médaille dans l’issue de la guerre.

Des baguettes au cœur du dénouement final

L’analyse croisée des baguettes du père et du fils Malefoy montre surtout que les Malefoy ont au moins une importance symbolique dans l’issue de la guerre. Même si cela est un échec, la baguette de Lucius dans la main de Voldemort se destine à tuer Harry Potter tandis que la baguette de Drago dans la main de Harry sert à tuer Voldemort. Est-ce là une métaphore de la scission entre père et fils, une divergence définitive d’opinion et de destin ?

Apparaît aussi un énième parallèle entre Voldemort et Harry qui, tous deux, ont récupéré la baguette d’un autre sorcier pour s’affronter (même si Harry ne sait pas à l’avance qu’il utilisera la baguette de Drago dans la confrontation finale ; même si Voldemort échoue à tuer Harry avec la baguette de Lucius).

Harry et Voldemort s'affrontant pour la dernière fois.
L’ultime affrontement entre Voldemort et Harry Potter.
© Harry Potter et les Reliques de la Mort (Deuxième Partie)

L’ironie veut donc que Voldemort se fasse tuer par la baguette d’un Mangemort, quand bien même Drago n’est pas devenu un Mangemort par grande conviction ni même par réel choix. Était-il prédestiné à vaincre (même indirectement) lui-même le Seigneur des Ténèbres ? Si Harry est bien l’Élu, Drago suit peut-être une autre prophétie : dans la mythologie grecque, “Draco” était le nom de l’un des chiens d’Acteon, qui a trouvé la mort, dévoré par eux.

En outre, rappelons que c’est Drago qui est, avant Harry, le véritable propriétaire de la baguette de Sureau. Cet élément de l’histoire a une grande importance dans l’affrontement final entre Harry et Voldemort. C’est lui qui constitue le « défaut du plan » de Voldemort (Harry Potter et les Reliques de la mort, chapitre 36) :

« Cette baguette continue à ne pas marcher pleinement pour vous, parce que vous n’avez pas assassiné la bonne personne. »

Harry à Voldemort dans « Harry Potter et les Reliques de la Mort », chapitre 36 (“Le défaut du plan”).

Drago ne saura sans doute jamais qu’il a été le propriétaire de la baguette la plus puissante qui soit et que c’est en partie à cause de cela que Voldemort n’a pas pu vaincre Harry. Toujours est-il qu’il a bel et bien joué un rôle — et pas des moindres — dans le dénouement final de l’intrigue.

Et après ?

On ne sait si Drago récupère sa baguette après la guerre. Dans la pièce de LEnfant maudit, sa baguette est faite d’aubépine, mais nous ne pouvons avoir la certitude qu’il s’agit bien de la même. S’il la récupère, alors il récupère la baguette ayant tué Voldemort et, du point de vue de l’évolution identitaire du personnage, cela est très loin de paraître insignifiant.

Pour Lucius comme pour Drago, la perte de la baguette semble raconter leur fin, ou tout au moins sonner le glas de leurs traditions familiales conservatrices, et donc de ce qu’ils ont été, de ce qu’ils ont incarné jusqu’alors. Après la fin vient la renaissance : Drago aura un fils qu’il élèvera, avec sa femme Astoria, dans une mentalité très différente de celle de ses parents.

Rappelons d’ailleurs que Narcissa avait également perdu sa baguette : prêtée à son fils pour remplacer la sienne, elle a fini détruite dans le Feudeymon de la Salle sur demande (Harry Potter et les Reliques de la Mort, chapitre 31). Les baguettes sont donc encore une fois au cœur d’une transmission, d’un passage d’une génération à une autre : celle des figures parentales, conservatrices, sont détruites ; celle de l’enfant, en plus d’avoir été le catalyseur de cette transmission, évolue avec lui et ouvre un avenir meilleur. Si, en outre, Drago a bien gardé la même baguette, j’aime y voir un héritage d’autant plus symbolique au vu de ce qu’il raconte, un rappel constant, pour Drago, de l’équilibre fragile du Bien et du Mal qu’il va lui falloir enseigner à Scorpius, et ainsi de suite…

Lucius parlant à son fils Drago.
Lucius et Drago au Manoir Malefoy.
© « Harry Potter et les Reliques de la Mort » (Première Partie)

Pour poursuivre sur la thématique des baguettes, n’hésitez pas à lire l’article consacré à la baguette de Voldemort ou encore l’analyse des bois de baguette.

Sources : Wizarding World, Harry Potter et les Reliques de la Mort (films et livre).

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