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Magie et technologie volume 2: Les usages de la technologie magique.

Cet article est le deuxième d’un triptyque consacré au sorciers et à la technologie. Vous pouvez retrouver le volume 1, qui se consacre aux bases de la technologie magique. Vous pouvez également directement vous rendre au volume 3, dédié à l’analyse de la fascination d’Arthur Weasley.

La magie est-elle toujours primaire, évidente, ou peut-elle être au cœur d’un oeuvre de confection?
Pourquoi les sorciers choisiraient-ils d’avoir recours à un objet magique plutôt qu’à leur propre magie?
La technologie moldue est-elle si différente? Comment expliquer la charmante fascination d’Arthur Weasley?

Si ces questions vous font cogiter, la Gazette vous propose quelques pistes de réponses, pour éclairer un peu ce domaine peu exploré de la magie qu’est la technologie, et pour ouvrir le débat.


B] Les sorciers et le recours à l’objet technologique: abandonner sa maîtrise sur la magie, avoir recours à la magie d’un autre.

Question du jour : au nom de quoi un sorcier peut-il renoncer à sa propre puissance, à sa magie authentique, pour lui préférer des objets investis de la puissance de quelqu’un d’autre?
Nous avons quelques idées à ce sujet.

  Se faciliter le quotidien.

Tout d’abord, la technologie permet aux sorciers de palier à leurs propres faiblesses en matière de magie. Par exemple, on peut imaginer que Tonks, qui est assez peu habile pour les sortilèges ménagers, aura souvent recours au nettoie-tout magique de la mère Grattesec.

«-Récurvite!
Quelques plumes et des fientes de hibou disparurent aussitôt.

 C’est un peu mieux, mais je n’ai jamais très bien su maîtriser tous ces sortilèges ménagers. »»

C’est également vrai de domaines de la magie moins triviaux, et plus délicats à maîtriser ou chronophages, dans lesquels se sont engouffrés certains industriels -pensons notamment à la production de potions en tout genre : philtres d’amour, potion Lissenplis

Il faut aussi penser aux habitants du monde magique qui ne disposent pas de puissance magique propre : les Cracmols. Dans une société où tout est pensé en fonction de la maîtrise de la magie, ils font figure d’individus marginaux, contraints d’avoir recours à la magie d’autrui, ou pire! d’emprunter des techniques moldues -nous reviendrons sur ce point dans le troisième article.

Cette pratique de la délégation, si elle semble dans un premier temps combler certaines inégalités, pose un réel problème de dépendance à la technologie dans l’univers sorcier. Cette dépendance est facteur de risques, notamment en matière de sécurité contre les mages noirs: que serait-il arrivé si Fred et George, fournisseurs du Ministère en gamme de vêtement Protego, n’avaient pas été fiables? Le Ministère aurait été compromis en peu de temps. (Hello Microsoft, Hello Ministère de la Défense…)

À ce titre, on peut penser que le monde sorcier de J.K. Rowling est en réelle tension, et que Harry et Voldemort, adeptes de la magie des origines, sont en porte-à-faux avec une société qui questionne de moins en moins les sources du pouvoir.
Cet élément, parmi d’autres, renforce le caractère inclassable de la saga Harry Potter, qui peut, à certains égards, présenter une société hors-nature, sur le point de basculer vers un degré de dépendance supérieur à la technologie, et donc s’approcher de la science-fiction.

  Drago: ne pas se salir les mains avec un acte cruel, ou rester anonyme?

Drago est un sorcier très habile, doué pour les potions, meilleur qu’Harry en occlumancie, très certainement également en magie noire. Cependant, lorsqu’il essaie de tuer Dumbledore, ses tentatives sont de lamentables échecs. La conversation entre Rogue et Drago nous fait clairement comprendre que Drago n’a pas besoin d’aide logistique : il maîtrise ses tentatives, et en quelque sorte maîtrise ses échecs.

Deux choses au moins sont à en déduire : tout d’abord, qu’il n’a pas de réelle volonté de nuire à Dumbledore, et qu’il peine à se résoudre à le tuer. Mais aussi, si on observe la façon dont il met en place ses tentatives, qu’il souhaite frapper de manière indirecte, par l’intermédiaire d’objets ensorcelés ou de boissons empoisonnées.

Nous pouvons trouver une première explication d’ordre stratégique dans l’idée que Drago souhaite rester caché, et ne pas se dévoiler au grand jour.

Mais une explication d’ordre éthique pourrait être plus intéressante encore : Drago se refuse à faire usage d’une mauvaise magie. Le recours à des artefacts investis d’une puissance négative par d’autres lui assure, en quelque sorte, de rester pur, de ne pas se salir l’âme avec un acte dont il ne veut pas, mais qu’il est condamné à mener à bien pour protéger sa famille.

Cette hypothèse trouve une confirmation au moment de son duel avec Harry : n’allons pas croire un seul instant que Drago est moins bon sorcier qu’Harry, ou plus lent à dégainer, même dans l’état de fatigue émotionnelle où Harry le trouve. Cependant, contrairement à Harry, qui dans le tome 5 attaque Bellatrix sous l’effet de la colère et ne parvient pas à réellement souhaiter lui faire du mal, Drago a déjà été confronté à une réflexion sur la capacité de produire le mal, et ne s’y est pas encore résolu. Voilà pourquoi il hésite et perd du temps avant de lancer le sortilège, alors qu’Harry, inconséquent, irréfléchi et inconscient des effets de son maléfice, attaque d’emblée.

Donc: la technologie protège et dédouane. L’effet pervers de cet usage nous est cependant bien connu : il suffit de penser à Katie Bell. Faire appel à une puissance nuisible tierce ne signifie pas s’en rendre maître immédiatement, et les dommages collatéraux peuvent être tragiques.

  Maugrey: se protéger d’autrui au moyen d’objets ensorcelés par autrui. Un paradoxe.

Le rapport des sorciers à la technologie nous apparaît, à la réflexion, tellement constitutif de leur identité, qu’on ne peut que s’étonner de la crédulité de Dumbledore à l’égard de l’imposture de Croupton Jr.

Maugrey Fol Œil est connu pour sa paranoïa, mais également pour son extrême vigilance en matière de magie. L’écho que nous avons de son duel avec Croupton Junior nous l’indique : c’est avant tout à sa propre magie qu’il fait confiance pour se protéger, par exemple en ensorcelant des poubelles.

«– Qu’est-ce qu’elles ont fait, les poubelles ? demanda Mr Weasley, en écrivant précipitamment.
– Elles ont fait un bruit d’enfer et ont jeté des ordures partout. Apparemment, l’une d’elles était encore en train de lancer des déchets à l’arrivée des Gentes Dames…»

On ne peut que s’étonner, ceci une fois établi, et partant du principe ou Dumbledore est censé bien connaître Fol Œil, que ce dernier ne détecte pas la supercherie en entrant dans le bureau de son professeur.
Quoi de plus paradoxal, en effet, pour un sorcier aussi paranoïaque, que de remettre toutes les clés de sa sécurité à des artefacts ensorcelés par d’autres: Scrutoscopes, Glace à Ennemis et autres…

«À présent, le bureau était plein d’objets extrêmement étranges que
Maugrey avait dû utiliser à l’époque où il était Auror.
Il y avait sur sa table une sorte de grosse toupie en verre craquelé. Harry reconnut aussitôt un Scrutoscope. Il en possédait un lui-même, mais beaucoup moins grand que celui-là. Dans un coin, sur une petite table, était posé un objet qui ressemblait à une antenne de télévision en or, particulièrement contournée, qui émettait un léger bourdonnement. Un miroir, ou quelque chose de semblable, était accroché au mur, mais il ne reflétait rien. On y voyait se mouvoir des silhouettes sombres dont aucune ne se dessinait nettement.
– Tu t’intéresses à mes détecteurs de magie noire ? dit Maugrey qui observait Harry avec beaucoup d’attention.»

Ceci ayant été dit, on peut proposer une autre lecture du rapport de Maugrey aux artefacts, mettant cette fois-ci en cause leur fiabilité: car s’il a réellement confié sa sécurité à toutes sortes de détecteurs, probablement renforcés de ses propres sortilèges, alors la victoire de Croupton Junior sur l’Auror constitue un véritable aveu d’échec pour la technologie magique. Les ennuis de Croupton Junior avec les Scrutoscope de Maugrey, qu’il a neutralisés, illustrent bien le caractère pervers de la confiance investie dans les objets magiques: certes efficaces, ils sont cependant facilement neutralisables, et trompent la vigilance de leurs utilisateurs.

  Hermione: s’abandonner à la Belle Magie, un vertige?

Nous avons vu auparavant que la technologie peut aider les membres de la société sorcière, plus ou moins habiles en magie, à accéder à toutes les fonctions utilitaires et à gérer au mieux leur quotidien.

Nous allons désormais, tome 6 chapitre 6 à l’appui, nous intéresser à un phénomène qui pousse plus loin le rapport d’aliénation du sorcier, d’abandon à la puissance magique exercée par autrui : La magie qui vend du rêve !

«Hermione avait réussi à se glisser jusqu’à un grand présentoir, à côté du comptoir, et lisait à haute voix ce qui était écrit sur une boîte ornée d’une image montrant un jeune homme séduisant et une jeune fille pâmée d’admiration sur le pont d’un navire de pirates.

 « Une simple incantation et vous entrerez dans un rêve éveillé de trente minutes, hautement réaliste et d’une exceptionnelle qualité, facile à utiliser dans un cours de durée moyenne et pratiquement indétectable (les effets secondaires peuvent entraîner un regard vide et une tendance à baver). Interdit à la vente aux moins de seize ans. » Tu sais, fit remarquer Hermione en levant les yeux vers Harry, c’est vraiment extraordinaire, comme magie!»

Concrètement, ceci est une tablette, ou un Ipad. C’est un gadget high-tech, très facile d’emploi, qui donne à l’utilisateur l’impression d’avoir un pouvoir démentiel.

L’objet en soi du Rêve Eveillé produit par les Weasley fascine et soulève une multitude de questionnements : Est-ce Hermione qui voit sur la couverture une jeune fille pâmée d’admiration sur le pont d’un navire de pirates? Est-ce la déjà un rêve qui lui est propre? Ou s’agit-il d’un rêve générique? Ou pour le dire autrement, l’objet réagit-il à l’utilisateur pour créer un rêve qui lui soit propre, ou se contente-t-il de proposer un rêve identique à ceux qui en font l’acquisition?

Son utilisation, d’autre part, est simplissime : il suffit d’une incantation.

En clair, une très faible production magique de la part de l’utilisateur donne accès à un effet éblouissant. C’est là que se joue le vertige de cette magie, dans l’écart gigantesque entre effort et résultat.

Ce dernier aspect de la technologie nous renvoie, encore une fois, et de façon peut-être plus vive encore que dans les cas précédents, à un risque majeur: celui de l’abandon, de la déprise totale du pratiquant de la magie d’avec la matière qu’il travaille.

Le sorcier contemporain d’Harry Potter n’a plus besoin de comprendre la magie, de savoir comment obtenir des résultats, pour les obtenir. Dès lors se pointent un certain nombre de risques: contre-emplois, incapacité à contrôler la magie, dommages collatéraux…

Cet article est le deuxième d’un triptyque consacré au sorciers et à la technologie. Vous pouvez retrouver le volume 1, qui se consacre aux bases de la technologie magique. Vous pouvez également directement vous rendre au volume 3, dédié à l’analyse de la fascination d’Arthur Weasley.

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