Procès JKR/WB c. RDR – Compte-rendu du 2e jour
Toutes les informations sont dans notre dossier sur le procès J.K. Rowling et Warner Bross contre RDR Books.
Un compte-rendu détaillé de la deuxième journée du procès par le blog juridique du Wall Street Journal.
« Des rubans d’images mouvantes se mirent à flotter dans son sillage en se déroulant comme des bobines de film. »
(description de la « salle des cerveaux » dans Harry Potter et l’Ordre du Phénix de J.K. Rowling ; traduction Jean-François Ménard)
« Les cerveaux flottent en sortant du tank, se dévidant de rubans de pensée, comme des bandes de film.. »
(description de la « salle des cerveaux » dans le Harry Potter Lexicon de Steve Vander Ark)
Combien le Harry Potter Lexicon ajoute-t-il à l’univers des connaissances Harry Potter ? En terminologie de la propriété intellectuelle, le guide de référence de Steve Vander Ark, qui s’auto-proclame fan de Harry Potter, est-il « transformatif » ?
Lorsque Vander Ark, 50 ans, ancien bibliothécaire dans le Michigan, est monté à la barre ce matin dans le procès J.K. Rowling et Warner Bros. contre RDR Books, cette question est devenue centrale : qu’est le Lexicon, exactement ? À 50 ans, Vander Ark a l’air bien plus jeune que son âge. Il parle d’une voix douce de bibliothécaire, comme s’il lisait à un groupe d’enfants. Quelques fans de Harry Potter, assis derrière nous, ont remarqué que Vander Ark ressemble un peu à Harry, et même si cela ne nous serait pas venu à l’esprit, nous devons bien dire que nous sommes d’accord.
Mais ne perdons pas de vue l’aspect légal. Voici le moment où Vander Ark a éclaté en sanglots, au cours d’un témoignage qui a duré encore plus longtemps que celui de Rowling :
Le Lexicon apporte-t-il des éclaircissement supplémentaires sur Harry Potter ? Dans son témoignage d’hier, Rowling a déclaré que le Lexicon est inutile, puisqu’il n’est rien d’autre qu’une reprise de son oeuvre, mise dans l’ordre alphabétique, avec de nombreuses inexactitudes qui plus est. Mais aujourd’hui, lorsque l’avocat de Rowling, Dale Cendali, a demandé à Vander Ark s’il estimait que le Lexicon « copie » l’oeuvre de Rowling, Vander Ark a éludé la question quelque peu, en répondant « c’est un guide de référence sur une oeuvre littéraire, alors bien entendu, il fait référence aux livres qui constituent ses sources… Par endroits, nous utilisons des expressions qui sont identiques ou semblables. »
Quand l’avocat de RDR, David Hammer, a interrogé Vander Ark à son tour, il a approfondi ce point. Lorsqu’on lui a demandé la quintessence du Lexicon, Vander Ark a emprunté un terme de sa profession : il a dit que le Lexicon était « un Vade-mecum » [ou aide-mémoire] avec « des qualités de synthèse », dans lequel on peut facilement trouver des informations sur l’énorme univers potterien.
Vander Ark a-t-il consciemment enfreint les lois du copyright ? Cendali a tenté de mettre à jour certaines connaissances du droit de la propriété intellectuelle que Vander Ark pourrait avoir, en tant qu’ancien bibliothécaire, afin de montrer qu’il était peut-être conscient que RDR comptait enfreindre les droits de Rowling. Cendali a montré un courriel envoyé par Vander Ark au webmestre d’un autre site potterien. Vander Ark, visiblement désenchanté du contrat qu’il avait signé avec RDR en août, y écrivait « je romprais volontiers mes liens avec RDR. Ils m’ont menti, m’ont induit en erreur, ont pris avantage de moi et au final ont ruiné la bonne relation que j’avais avec les fans et avec Rowling. »
Qu’est-ce qui est le plus important ? L’argent ou la passion ? Hier, Rowling a déclaré que le procès n’est pas une question d’argent, mais de principe. Anthony Falzone, un des avocats de RDR, a dit dans ses remarques d’ouverture que pour Vander Ark, ce n’avait jamais été une question d’argent, mais plutôt de passion. Aujourd’hui, nous avons pu sentir ce qu’il en était sur les deux fronts. Selon Vander Ark, son site lui a rapporté environ $6500 [4100€] entre 2000 et 2008, grâce aux publicités.
Mais la partie la plus révélatrice du témoignage de Vander Ark était à la fin de l’interrogatoire de Hammer. Il lui a demandé s’il se considérait encore comme un membre de la communauté de fans de Harry Potter – ceux qui, dans les mots que Vander Ark a utilisés, consacrent l’essentiel de leur temps libre à tout ce qui a trait à Harry Potter – il a ravalé un sanglot et dit « j’en faisais partie ». Hammer a insisté, et il a changé sa réponse. « J’en fais partie », a-t-il dit, avant de fondre en larmes.
Hammer lui a ensuite demandé pourquoi cette question était si chargée en émotions. Reprenant ses moyens, et faisant tout son possible pour regarder au-delà de J.K. Rowling, que les avocats des plaignants avait placée juste devant la barre, Vander Ark a déclaré « ça a été difficile, parce que j’ai reçu beaucoup de critiques, et ça n’a jamais été mon intention. Je comprends pourquoi on me les fait, mais c’est difficile. Le Lexicon a été une part importante de ma vie ces huit ou neuf dernières années, et voilà où ça a mené… »
A voir aussi :
Le dossier intégral
Compte-rendu de la 1ère journée
Ce que le juge en pense