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Faire des sorcières un symbole positif.

Les sorcières peuvent-elles se débarrasser de leur grand âge et de leur aspect hideux (verrue sur le nez, dos voûté…), et sortir de leur histoire figée et oubliée pour s’imposer en symboles des luttes contemporaines: féminisme, écologie, anticapitalisme?
C’est la mission que s’est fixée l’éditrice Isabelle Cambourakis, à l’initiative de la collection « Sorcières ».

Quoi que puissent nous laisser penser les sorcières fortes de notre littérature chérie, et bien qu’Emma Watson, notre sorcière préférée, compte parmi les plus charismatiques ambassadrices du féminisme, le symbole de la sorcière n’est pas forcément le plus facile à s’approprier pour les féministes. Il est marqué par un long passé d’utilisations péjoratives, burlesques, qui pourraient ridiculiser toute féministe s’en revendiquant.

Cependant, il est aussi l’un des plus aptes à porter les revendications féministes, dans l’optique de changer la société, de faire entendre les besoins et les pouvoirs des femmes. Parce que « sorcière » s’accorde quasi-exclusivement au féminin ; parce que, sous un angle historique, la chasse aux sorcières est très souvent perçue comme une « guerre contre les femmes », qui fit des milliers de victimes innocentes ; ou parce qu’aujourd’hui encore, dans certains pays comme le Népal, la chasse aux sorcières est avant tout un prétexte pour réduire la condition de la femme et la tenir en respect au sein d’une société patriarcale.

Toutes ces considérations légitiment l’emploi du symbole de la sorcière, martyre au sein de l’histoire des femmes, comme figure de proue du mouvement féministe de contestation de la société. Si on lui enlève ses ongles crochus, sa verrue et ses airs d’illuminée, la sorcière n’est « plus » qu’une femme éduquée, curieuse, concurrente des scientifiques, académiciens et autres autorités établis par un régime précis à un moment donné.

Il faut cependant en passer par une étape intermédiaire: la réhabilitation de la figure de la sorcière, et la diffusion massive d’une histoire positive de ces femmes, écrite avec un souci de représenter leur perspective, leur quotidien, pour contrer l’image officielle qui nous a été transmise par leurs bourreaux.

C’est à cette fin qu’a été inaugurée, au début de l’année 2015, la collection « Sorcières », qui regroupe ouvrages de sciences humaines et essais. Elle se positionne comme féministe, et sa responsable se propose de « faire entendre les multiples voix des féminismes, » de rendre accessible des textes peu publiés, qui n’ont pour certains jamais été traduits.
Dans le contexte d’une Europe réactionnaire, où les questions relatives au corps de la femme et à la sexualité son souvent le cœur d’interminables débats, Isabelle Cambourakis, éditrice, se propose d’offrir une vitrine aux textes féministes, d’abord en se replongeant dans les textes théoriques des années 70 et 80, mais aussi en se faisant l’écho de voix contemporaines.
Son objectif est éminemment politique: il s’agit prendre le féminisme au sérieux, et d’offrir une réflexion sociale différente à tous ceux qui souhaitent le développement d’une société alternative.

Deux livres ont pour le moment été publiés dans cette collection:

Sorcières, sages-femmes et infirmières, de Barbara Ehrenreich et Deirdre English:

Ce premier ouvrage propose une réflexion plutôt axée sur le corps des femmes, leur santé. Paru en 1973, c’est un texte pionnier pour la question de la réappropriation de leur corps par les femmes.
Il trouve une résonance particulière à l’heure actuelle partout où les pressions sociales et appareils législatifs contraignent les femmes à ne pas pouvoir disposer de leurs corps comme elles l’entendent. Mais il amène également à interroger le rapport à la nature hors de la rationalité imposée: et si le rapport intuitif qu’avaient les « sorcières » à la nature avait prévalu?

L’autre livre actuellement disponible, Rêver l’obscur, Femmes, magie et politique, de Starhawk, date des années 80.

Il est l’un des premiers à théoriser le rôle de la femme dans la construction de la société, à l’époque des grandes luttes féministes antinucléaires, antimilitaristes. Il pose également la question de la spiritualité sous un angle purement féministe: comment la penser hors de la société patriarcale? Quelles en seraient les pratiques?

Qu’il s’agisse du rapport d’une femme à son propre corps, à la société, à la nature ou même à la spiritualité, l’étude de la sorcière sous un angle sociologique et historique est source de nombreuses réponses. Contre ce qu’elle appelle « l’amnésie de l’histoire du féminisme », l’éditrice entend, en rééditant ces textes, rendre leur actualité à des questions déjà posées dans le passé, mais qui n’ont rien perdu de leur caractère révolutionnaire.

A lire et à voir, pour approfondir ce sujet:

  •  Télérama n°3404, 11-17 avril 2014, pp 43-45: « Tous sorcières! »
  •  Sorcières, sages-femmes et infirmières, B. Ehrenreich et D. English, éd. Cambourakis, coll. Sorcières, 2015, 128 p., 16 euros.
  • Rêver l’obscur, Femmes, magie et politique, Starhawk, éd. Cambourakis, coll. Sorcières, 2015, 384 p., 24 euros.
  • l’interview d’Isabelle Cambourakis.
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