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Podcast ASPIC ep. 24 : Podcasts et expertises du fandom Harry Potter

Bienvenue dans le 24è épisode de notre podcast l’Académie des Sorciers !
Pour cet épisode, nous nous sommes intéressés… aux podcasts Harry Potter en tant que dispositifs littéraires.

Nous recevons pour cela Alizée Castagna, étudiante en Master de Recherche en Études Littéraires à l’université de Bordeaux Montaigne, dont vous avez déjà pu découvrir la voix dans l’épisode de Salut les Sorciers consacré à Serdaigle !

Nous discutons des nombreux formats de podcasts qui existent, les différentes perspectives de lecture qu’ils apportent, l’évolution de notre perception de l’histoire en grandissant, et plus largement, de l’expertise ordinaire des fans de Harry Potter.

On termine avec nos recommandations de nos émissions préférées consacrées à Harry Potter et au Wizarding World. Consultez notre dossier récapitulatif ICI !

Bonne écoute !

MUSIQUE 

Sorcières, sorciers et moldus, erudits ou curieux, bienvenue dans ASPIC;, l’Académie des Sorcers, un podcast intéressant et captivant, une émission proposée par la Gazette du Sorcier. 

Alix (Ax) : Bienvenue dans ce 24e épisode de l’Académie des Sorciers, je suis Alix… 

Marjolaine (M) : Et je suis Marjolaine, et nous avons le plaisir aujourd’hui de recevoir Alizée Castagna qui est étudiante en master de recherche en étude littéraire à l’université de Bordeaux Montaigne. Et si vous avez écouté le dernier épisode en date de Salut les Sorciers, vous reconnaîtrez peut-être sa voix puisqu’elle a participé à l’épisode qui était consacré aux Serdaigles, qui est sorti au mois de mai. Donc tu as déjà une expérience podcast Gazette, bon retour parmi nous Alizée ! 

Alizée (Az) : Merci beaucoup ! Je suis ravie ! 

M : Ça va, on ne t’a pas fait trop peur dans l’épisode de Salut les Sorciers ? 

Az : Non pas du tout ! C’était extrêmement intéressant surtout à propos de notre magnifique maison. Très fière ! 

M : Tout à fait. Là tu es encore dans un épisode 100% Serdaigle évidemment, puisque ASPIC… De temps en temps on accepte d’avoir des invités d’autres maisons mais… 

Ax : Mais c’est bien parce que nous-mêmes on est toutes les deux Serdaigle donc on garde la majorité quoi qu’il arrive. 

M : Voilà, quoi qu’il arrive on sait qu’on est en majorité ! La raison pour laquelle on t’a proposé de participer aussi à ASPIC c’est que c’est un épisode un peu spécial, puisque c’est suite à un dossier que tu as réalisé dans le cadre de ton master et pour lequel tu nous avais contacté pour qu’on fasse partie de tes « enquêtés ». Tu nous a posé plein de questions, et donc c’est après avoir répondu à tes questions qu’on a aussi reçu le résultat de ce fameux dossier qui était intitulé « Le podcast audio comme dispositif littéraire appliqué à la saga Harry Potter », un super sujet ! Et on était honorées de faire partie de tes enquêtés. Et du coup pour commencer , on voulait savoir si tu pouvais revenir un peu sur comment t’es venue l’idée de proposer ce sujet à ton professeur ? Et comment ça a été reçu ? Nous donner un peu les coulisses de comment on en vient à faire un dossier sur Harry Potter quand on est en master d’études littéraires. 

Ax : Et plus spécifiquement sur les podcasts. 

M : Eh oui, sur les podcasts surtout ! 

Az : Alors, en vérité au début de l’année je savais que le master c’est complètement différent de la licence, et je me suis lancée dans un mémoire qui n’a rien à voir avec la pop culture. Et je savais que je voulais à un moment à un autre – parce qu’on commence à s’intéresser à la littérature jeunesse – intégrer la saga dans un de mes dossiers cette année. mais je ne voulais pas que ça tombe comme un cheveux sur la soupe. Et il se trouve que le séminaire auquel j’ai assisté était justement sur les dispositifs littéraires et c’est une notion qui est assez large, et selon l’angle de vue. J’y ai vu une opportunité. C’est un concept qui est un peu difficile à résumer et je suis loin d’être une spécialiste, mais très rapidement on peut dire que c’est comme un prisme par lequel on étudie ou on voit une œuvre, et ce prisme peut être interne (comme la fenêtre chez Zola) ou externe (comme pour nous les podcasts). Et quand notre prof nous en a parlé, je me suis vraiment dit « Mais en fait ça correspond tout à fait à ce qu’est un podcast ! ». Et je me suis dit tant qu’à parler de podcast, autant parler de ce que j’écoute, et moi les podcasts que j’écoute c’est Harry Potter et c’est principalement ASPIC (parce que je suis issue du milieu universitaire pour le moment) et Fréquence 9 ¾. C’est les deux dont j’ai le plus parlé. Pour ce qui est de l’accueil, il a été super enthousiaste, parce que mon prof était adorable. C’est quelqu’un qui est très encourageant et qui est extrêmement ouvert, et ça ça fait plaisir. Il y en a beaucoup dans le milieu universitaire, on pourrait ne pas le croire mais c’est le cas. Et en fait il était très intéressé parce que c’est un professeur de littérature française. Il connaît pas très bien la littérature jeunesse britannique, et ce n’est pas son domaine d’expertise. Et lui, il était très demandeur de ce genre de dossier. Dans mon dossier, comme lui n’est pas du tout lecteur, j’ai précisé des termes qui pour nous peuvent sembler extrêmement anodins : moldu, Potterhead, ou même expliquer qui est Remus Lupin. Mais en faisant ce travail sur ce point de vue mon prof a vraiment beaucoup apprécié, il était très content et c’est vrai qu’il a été très… Lui qui n’était pas au courant de l’engouement qu’il y a autour de la saga, ça lui a vraiment plu. Ça lui a ouvert, parce qu’il est très demandeur de ça, d’autres perspectives lui aussi pour ses recherches. 

M : C’est intéressant parce que non seulement ça lui a ouvert sur le sujet Harry Potter, littérature jeunesse britannique qui n’est pas son domaine mais aussi podcast, ou est-ce qu’il voyait un peu plus ce que ça pouvait donner ? 

Az : Quand je lui ai proposé sur les podcasts il m’a quand même demandé d’éclaircir la notion parce qu’il y a deux sortes de podcasts : il y a le podcast audio et le podcast vidéo. Si on a la vision du podcast vidéo comme ce que faisaient les premiers youtubers, ce n’est absolument pas ce dont on parle ici. Du coup je lui ai plutôt expliqué le podcast comme moi je l’entendais et il m’a dit que ça rentrait. Parce que je lui posais la question surtout pour savoir si ça rentrait dans le cadre du séminaire, éviter de faire un hors sujet. Et il m’a dit que oui, ça rentrait parfaitement dans ce cadre et qu’en effet le podcast c’était quelque chose sur laquelle il ne s’était pas encore penché et que ça pouvait beaucoup l’intéresser parce qu’il fait à l’heure actuelle des recherches sur les dispositifs littéraires. Et comme je disais c’est une notion très large, il essaie de brosser un portrait de tout ce que ça pourrait être et des différents médias que ça véhicule. Donc là j’étais plutôt contente qu’il me donne son feu vert et qu’il me dise « Oui, c’est une super idée ! ». 

Ax : Pour les auditeurs qui ne savent pas exactement ce que c’est ou qui peuvent imaginer tout ce que ça peut englober, est-ce que tu peux expliquer un peu ce que c’est un dispositif littéraire ? Et est-ce que tu peux peut-être donner un autre exemple que le support podcast pour qu’on puisse situer un peu plus la galerie des dispositifs existants et possibles ? 

Az : Comme je disais c’est vraiment très large en fonction de qui le définit. Notamment, il y a un auteur que j’ai cité qui le définit de façon extrêmement large, c’est-à-dire que ça vient à la base du Panopticon, qui est une forme de prison, et il étend ça jusqu’à la cigarette ou le stylo. Alors ça paraît très très vague dit comme ça, et on peut se dire que ça n’a aucun rapport, mais en fait le dispositif ce serait comme le point d’entrée dans une œuvre, et réfléchir une œuvre selon cette entrée. Et donc il y a le dispositif interne, et ça marche pour autre chose que l’écriture, ça marche aussi pour les tableaux. Par exemple, un miroir dans un tableau ou un miroir dans une œuvre qui aurait une place centrale pourrait être considéré comme un dispositif. 

Et pour ce qui est des dispositifs externes, autres que le podcast, je pensais notamment à ce qu’à fait Valère Ndior avec les procès fictifs sur Harry Potter qui peuvent totalement faire partie de ce qu’on appelle un dispositif. Parce que c’est étudier l’œuvre, ou du moins étudier quelque chose d’extérieur sous le prisme de quelque chose de concret. Et créer des procès de la saga dans la vraie vie serait comme voir la saga sous un angle différent, et ici juridique. Après pour les dispositifs internes de la saga, j’y ai un peu réfléchi mais c’est assez compliqué parce qu’on est quand même sur sept tomes qui ont pour la plupart tous une vision interne qui est la vision de Harry. Donc c’est plus difficile que de s’intéresser à des œuvres comme Zola ou Balzac qui, elles, ont une multitude de points de vue. Mais si je devais vraiment en prendre une… Non, je ne saurais pas en prendre un interne véritablement. 

M : Je ne connais pas du tout comme je n’ai pas fait d’études littéraires, je découvre en même temps. Je connais le principe du dispositif, mais là plutôt en sociologie et en anthropologie et tout ça. Mais est-ce que par exemple, si on pense à la biographie de Dumbledore par Rita Skeeter et le fait qu’on a l’histoire de Dumbledore qui est vue par différents biais, est-ce que c’est ça ? Ou est-ce que c’est pas tout à fait ça ? 

Az : Alors je pense que ce serait possible mais dans ce cas là ça ne serait pas une vision de la saga, ça serait plutôt la vision centrale du personnage de Dumbledore. Je pense sincèrement qu’on peut se focus seulement sur un seul personnage pour le voir, mais en fait, comme je le dis, ça dépend vraiment de la définition qu’on en prend. 

M : La Pensine peut-être ? Quand on a le récit du Prince, tout ça… 

Az : Oui la Pensine c’est vrai que ça pourrait être très très intéressant parce que la Pensine, malgré tout, est subjective et elle peut aussi être dupée, notamment avec Slughorn, ses faux souvenirs… Mais oui, la Pensine ne montre qu’un point de vue, et un point de vue qui peut être biaisé et qui est extrêmement subjectif. Par exemple quand Dumbledore plonge avec Harry et qu’il voit Morfin devant la maison des Gaunt, Harry comprend mais personne d’autre ne pourrait comprendre. C’est aussi très intéressant de le voir un peu comme une vidéo de souvenir qui est à la fois extrêmement réaliste parce que c’est ce qui s’est passé, et à la fois extrêmement subjective, parce que c’est ce qui s’est passé selon un point de vue. Oui c’est vrai que la Pensine on pourrait la considérer comme tel ! Après elle n’est pas présente dans tous les épisodes de la saga bien sûr, mais ceux dans lesquels elle est présente oui, je pense que ça pourrait marcher ! 

M : Hum, intéressant ! 

Az : Je sais aussi que j’ai pensé comme dispositif externe de la saga, il y a les bandes-dessinées comme Bloody Harry par exemple – je ne sais pas si vous les avez lues – d’Alexandre Arlene il me semble. A partir de ce biais là, il met en lumière des incohérences ou des faits qui sont drôles à propos de la saga et qu’on a tous un peu relevés. Je me revois avec la planche de la famille Malefoy qui maltraite Dobby, ils lui font tout faire sauf la lessive et ils sont obligés de laver leur linge à la main eux-mêmes puisqu’ils ne peuvent lui donner aucun vêtement. Cette vision humoristique et parodique à travers la BD, ça peut aussi être considéré comme un dispositif, ce que je dirais, externe. 

M : Ouais la parodie est un dispositif. 

Ax : Oui donc on peut élargir aux comédies musicales des Starkids, Puffs, toutes ces créations de fans un peu, en fait, qui réinventent un peu la saga d’une manière ou d’une autre. 

Az : Oui exactement. Selon moi, en tout cas ! Comme je disais je ne suis pas une spécialiste mais je pense sincèrement que ça pourrait très bien fonctionner, surtout qu’on est dans le cadre de ce qu’on explicitera plus tard de l’expertise ordinaire, qui est absolument fascinante comme sujet ! 

M : C’était une de nos motivations pour faire cet épisode avec toi, c’est pour explorer justement cette idée d’expertise ordinaire. Là vous l’avez compris, on va parler de podcasts, donc on va parler en partie de nous-mêmes mais pas que ! Au final, je crois qu’on va même faire plus ou moins exprès de se décentrer un petit peu pour ne pas parler que de nous parce que bon, ce n’est pas toujours très confortable de parler de soi-même. On voulait t’inviter aussi parce qu’on s’est retrouvées sujet de recherche de quelqu’un d’autre et nous-mêmes, qui avons un sujet de podcast sur les recherches sur la saga, ça faisait un peu une espèce de réflexivité comme on dit. Réfléchir à ce que nous on fait. Et ça c’est une démarche scientifique aussi de se dire : on prend un peu de recul sur ce qu’on fait pour réfléchir. On l’a déjà fait quand on parlait de culture de fans, avec déjà des invités qu’on a reçus pour réfléchir à tout ça, mais là c’est encore plus spécifique à ce que nous on produit, qui est un podcast ! Ça va être intéressant je pense ! 

Ax : Mais justement on parlait d’expertise ordinaire et de cette frontière parfois un peu floue entre le fan et le spécialiste. C’est un sujet dont on avait un peu parlé quand on avait fait l’épisode sur les conférences Harry Potter du Harry Potter Festival de Chestnut Hill. Il y avait cette conférence sur les “Acafan”. C’était un des éléments qu’on voulait remettre en avant ici, donc est-ce que tu pourrais nous réexpliquer un peu comment tu définis l’expertise ordinaire et comment on peut l’appliquer là, à ce prisme-là des podcasts Harry Potter et de la place des fans dans cette analyse-là ?

Az : Déjà, le concept d’expertise ordinaire n’est absolument pas de moi, c’est de Patrice Flichy qui l’a développé dans son ouvrage « Le sacre de l’amateur, sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique ». Je l’ai trouvé fascinant ce concept, parce que je trouve qu’il redonne ses lettres d’or à ce que des gens ont trop souvent stigmatisé. L’expertise ordinaire c’est littéralement une réflexion personnelle, qui est basée sur l’expérience personnelle de l’amateur ou de l’amatrice. Mais là, “amateur” il s’entend dans le meilleur des sens du terme en fait. C’est la personne qui aime, qui adore, c’est en ça qu’on entend amateur. On peut lui substituer le terme de “fan” et notamment dans ce qui est l’univers pop culture et dans Harry Potter. Personnellement c’est un mot que je n’aime pas du tout et je lui préfère celui de “passionné”. C’est exactement ce que vous faites, ce que la Gazette du Sorcier en général fait, ce que n’importe qui qui va théoriser sur l’univers d’Harry Potter fait. C’est une réflexion qu’on va mener sur la saga, sur un point précis ou sur son entièreté, qui soit complètement interne ou qui soit en lien avec le monde autour de nous. C’est toutes les réflexions qu’il peut y avoir sur la saga – pour Harry Potter mais bien entendu ça s’étend à tout. Et ces réflexions elles sont d’autant plus fortes, d’autant plus puissantes et d’autant plus intéressantes qu’elles sont menées par des amateurs et non par des professionnels. On ne voit pas trop comment il pourrait y avoir des professionnels de Harry Potter mais en vérité tous les universitaires comme vous avez invités et qui ont travaillé sur Harry Potter ne sont pas uniquement sur ce sujet-là, mais sur certains points on pourrait les considérer comme des professionnels. L’expertise ordinaire c’est les amateurs qui prennent de leur temps, de leur passion, de leur argent, pour tout ce qui est podcast, BD non-commercialisée et mise sur internet, ils mettent d’eux-mêmes dans leurs créations, dans leurs théories, dans tout ce qu’ils créent autour de la saga. Le conglomérat de tout ça forme une expertise qui est plus pointue encore que si quelqu’un était payé pour réfléchir sur la saga. 

M : Oui, carrément ! Mais je voulais juste revenir… Pourquoi tu n’aimes pas le terme de fan ? Est-ce que c’est le côté péjoratif qui est accroché, un peu historiquement, à ce terme ? Fanatique, tout ça… 

Az : Tout à fait ! “Fan”, ça vient de fanatique comme tu l’as dit, et on sait tous que quand on se dit fan, ou quand on entend fan, on sait tous pertinemment qu’on parle de quelqu’un qui adore un sujet de la pop culture. Mais cependant, fanatique, ça a quand même une très lourde connotation. Un fan et un fanatique ce n’est pas du tout pareil parce qu’un fan a conscience que le monde qu’il adore n’existe pas. Un fan a un grand esprit critique, ce qui n’est absolument pas le cas du fanatique. Sauf que ça reste des mots qui sont liés et le terme de fan est souvent utilisé pour être péjoratif et pour dévaloriser les personnes qui se disent fans. Être fan de, c’est mal. Être passionné de, c’est bien. Dans le langage courant, c’est ce qu’on entend et aussi c’est ce qu’on peut ressentir, nous particulièrement en tant que passionnés d’Harry Potter. Quand on se dit fan de, notamment face à des personnes qui ne sont pas du tout dans la saga, qui ne connaissent pas, et qui nous voient en tant qu’adultes passionnées d’une saga littéraire dite de jeunesse – parce que c’est le premier public visé – ça peut nous retomber dessus. Et on nous dit « Vous êtes des gamins, vous ne vous intéressez pas à des sujets de votre âge… ». Et ce sont des personnes qui ne voient pas la profondeur ou qui ne connaissent pas la profondeur de la saga et de tout ce qu’on peut dire dessus. Ils n’ont pas cette action d’expertise ordinaire. Tandis  que si on dit qu’on est passionné, et qu’on dit « Je suis passionné de l’univers Harry Potter » et qu’on développe en disant « C’est ce qui m’a ouvert à la littérature, c’est un foyer littéraire très vaste », ça passera toujours mieux que de dire « Je suis fan d’Harry Potter, c’est ce qui m’a ouvert à la littérature et c’est un foyer très vaste ». Et ce n’est pas bien de stigmatiser des mots mais pour moi les mots ont un pouvoir et le mot « fan » a été tellement utilisé pour dévaloriser ce qui se définissent comme tel que je préfère personnellement lui substituer le mot de « passionné ». 

Ax : J’ai envie d’apporter – après c’est une réflexion personnelle et il faudrait faire une étude un peu plus poussée pour vérifier si c’est vrai en toutes circonstances – mais j’ai l’impression que cette notion qui est l’idée que c’est dévalorisant est surtout vraie quand on parle du fait d’être fan de culture pop et notamment de l’imaginaire, la culture « geek ». Parce que je n’ai pas l’impression que si quelqu’un dit « Je suis fan de foot » par exemple, il y a cette même connotation négative. 

M : Ce n’est pas la même mais il y a quand même une connotation négative je pense. Parce que les fans, surtout qu’en plus en général dans le monde sportif quand on dit qu’on est fan de foot c’est surtout qu’on est fan d’une équipe, et du coup il y a ce côté pareil, fanatique… au soutien d’une équipe qui est un soutien loyal et irrationnel. 

Ax : Comme tu connais beaucoup mieux le sujet du sport que moi, tu as l’impression que c’est tout aussi négatif d’employer ce terme dans un domaine plus sportif ? 

M : Ça dépend de quel point de vue on se place. Si on se place du point de vue de la culture savante, de l’élite…etc, je pense que dénigrer les fans de sport et les fans de culture populaire, c’est pareil à mon avis. Effectivement, un fan de foot, pour lui… si jamais on fait des sous-groupes dans les cultures populaires, le sport d’un côté  et les cultures de l’imaginaire de l’autre, oui. Là je pense que ça dépend d’où on se place. On peut très bien aussi entendre à l’intérieur d’un groupe geek une manière de dénigrer ceux qui sont obsédés par le foot tu vois, par exemple. Ça peut exister aussi. Je pense que la fracture se fait plutôt entre cultures savantes et cultures populaires. Mais cultures populaires ça peut être culture de l’imaginaire, culture geek, sport-spectacle… tout ça. 

Ax : OK ! 

M : Pour revenir sur cette fameuse frontière… Par exemple dans ASPIC effectivement, tu nous l’avais pointé et tu l’as déjà dit un petit peu, mais on surfe vraiment sur cette frontière entre expertise professionnelle et expertise ordinaire, puisqu’on fait à la fois des épisodes où on valorise leur expertise professionnelle, mais on fait aussi appel à leur expertise ordinaire de fans. Et nous on confronte aussi notre expertise ordinaire de fans à une expertise académique ou professionnelle dans un certain domaine. Donc on est un peu entre les deux d’après ce que j’ai compris. 

Az : En fait pour moi c’est ce qui fait vraiment tout l’intérêt de ce podcast et toute sa puissance, parce qu’en fait on ne peut pas considérer entièrement que les invités que vous avez reçus font de l’expertise ordinaire, tout simplement parce qu’eux ont été formés à la recherche. C’est leur métier. Ils vont avoir un point de vue plus dans les normes par rapport à ce qui est de la recherche. Cependant, en tant que passionnés eux-mêmes – parce que sinon ils se seraient pas lancés dans le sujet Harry Potter – ils ont le même engouement que les fans pour se lancer dedans. Ils ont ce même engouement de Potterhead : « Ah je vais parler de ça, trop bien ! », mais ils y ajoutent la méthode et la structure qu’on peut apprendre à l’université. Je ne dis pas que c’est la meilleure… Je vais citer une des vos invités de l’épisode Harry Potter à l’Université, qui disait « Il y a des chercheurs médiocres et des fans géniaux ». En effet, il peut y avoir des universitaires qui n’ont pas les bonnes méthodes et des passionnés qui sont vraiment géniaux dans tout ce qu’ils font. Mais là ceux que vous avez invités c’est vraiment la frontière comme tu as dit, qui surfe entre le professionnel et le passionné. Et c’est tout ce qui fait le fondement de leur travail, et c’est en ça que leur travail est extrêmement intéressant. C’est qu’on a un fan qui va parler au niveau professionnel de la saga. C’est entre les deux, donc je ne sais pas si ça peut se considérer vraiment comme une expertise ordinaire mais quoiqu’il en soit c’est une expertise qui est d’autant plus intéressante. 

M : Très bien ! C’est toujours intéressant. Parce que ça je pense que c’est une question qu’on s’est beaucoup posée, et poser des mots là-dessus c’est toujours intéressant pour repenser tout ça. Pour revenir pour le format podcast, certes il y a le nôtre, ASPIC, mais il y en a plein plein d’autres. Tu en avais cité quelques autres notamment Fréquence 9 3/4 qui est un type de podcast sur lequel on va pas mal revenir… Mais avant de revenir sur ces différents types, on peut peut-être revenir sur qu’est-ce qui fait que le podcast est un dispositif particulier, qu’est-ce qui le caractérise ce dispositif ? Et notamment dans ton dossier tu utilisais une expression qui m’a un peu sauté aux yeux, je me suis dit « Ah c’est intéressant ! » mais j’aimerais bien savoir ce que ça veut dire vraiment. Tu dis que « le monde devient pratique » et j’aimerais bien que tu reviennes un peu là-dessus et que tu nous développes un peu ça parce que je me suis dit « Hum, je crois qu’il y a quelque chose d’intéressant derrière, j’aimerais bien en savoir plus » ! 

Az : Je me suis fait cette réflexion, je ne sais pas si c’est en grandissant que ça m’a sauté aux yeux ou si c’est quelque chose qui s’est vraiment développé ces dernières années et qui s’est accéléré… Mais quand je dis que le monde devient pratique, en fait je parle surtout de notre gestion du temps. Il y a des actions quotidiennes qui sont nécessaires mais qui sont fastidieuses. Je pense au ménage, je pense à prendre la voiture, à cuisiner ou à toutes ces autres actions qui… bah si on ne cuisine pas on ne mange pas, si on ne prend pas la voiture on ne va pas au travail… Ce sont des actions nécessaires mais qui ne sont pas forcément agréables à faire. Alors je sais qu’il y a des gens qui vont dire ça, mais il faut qu’on accorde du temps à ces actions et moi je les considère ni comme du temps de travail ni comme du temps de loisir. C’est un peu un temps entre les deux qui est obligatoire. Et certains vont me dire « Oui mais c’est nécessaire d’avoir un temps neutre ou un temps où on ne réfléchit pas, où on est complètement concentrés sur une tâche monotone, ça permet de se libérer un petit peu ». Et je suis d’accord avec ça. Cependant, je fais partie de ce genre de personnes qui doit prendre souvent la voiture et qui n’aime pas ça, qui n’aime pas cuisiner et qui… même si faire le ménage ça me rend heureuse parce qu’il n’y a plus de saletés chez moi, ce n’est pas quelque chose que j’apprécie de faire, de rester les mains dans ma serpillère. Et en fait, les podcasts sont un moyen de faire devenir ce temps neutre un temps de loisir. Le podcast va nous permettre de nous évader pendant des moments de la vie quotidienne qui, sans ça, seraient très insipides. Sans les podcasts j’aurais l’impression de perdre mon temps en fait, dans 45 min d’embouteillages, ou dans mes trente minutes de vaisselle. C’est là pour moi la vraie puissance du podcast et du format podcast en général, c’est qu’il a une nature complètement accessible, par tous et partout et à toute heure, à condition qu’on dispose bien sûr d’une connexion internet. Et que ce soit à huit heures du matin ou 23h, on peut écouter le podcast qu’on veut, où on veut, on peut le mettre dans sa voiture, on peut mettre un casque et l’écouter chez nous, pas besoin de déranger les autres ! Avec un casque justement, la personne qui vit avec nous peut ne pas forcément profiter et nous on est vraiment concentré sur nous-mêmes. Et c’est cette notion de « à la demande » où j’ai vraiment l’impression que le monde devient pratique : on veut rentabiliser notre temps, et le temps qu’on doit accorder à des tâches fastidieuses et nécessaires est rentabilisé dans l’écoute du podcast. Le podcast devient, pour ce qui est de Harry Potter, une bulle de magie qu’on fait entrer dans notre vie quotidienne et qui va nous libérer de la tâche qu’on est en train de faire. Il est clair que quand j’entends, pour ne pas vous citer tout le temps, les deux présentatrices de Goblet of Wine me parler du trajet du Poudlard Express qui ne fait aucun sens, je n’ai pas l’impression d’être en train de faire ma vaisselle du tout. Je n’ai pas du tout l’impression d’être dans quelque chose de fastidieux. Et ça passe beaucoup plus vite ! J’ai vraiment cette impression de rentabiliser mon temps. Le podcast c’est à ça qu’il est audio, ça permet de vraiment le trimballer partout avec nous. C’est-à-dire qu’on ne va pas lire un livre sur un vélo, en tout cas je ne vous le conseille pas, on ne va pas lire un livre en faisant la vaisselle – je l’ai déjà fait, mon livre ne s’en est pas sorti indemne… Tous les autres supports, à partir du moment où ils sont visuels, ils sont quasiment impossibles à mettre en place en commun avec une autre action. 

M : Ou en tout cas… Par exemple je sais qu’il y a quand même pas mal de gens, ou peut-être une autre génération qui a l’habitude d’avoir la télé en fond constant. Moi je n’ai jamais grandi comme ça, mais du coup on ne consomme pas vraiment ce qu’il y a à la télé quand on le laisse en fond, enfin j’imagine. C’est plus pour occuper cet arrière-plan, mais sur lequel on n’est pas vraiment concentré. Alors que quand on a un podcast dans les oreilles, on n’a pas trop d’autre choix que d’être un peu plus concentré que si on avait laissé la télé en fond de manière un peu passive. 

Ax : Justement, on parle souvent de fond sonore parce qu’on va autant écouter et attraper une petite anecdote ou une petite info au passage, ou une blague, mais on va rarement s’arrêter sur le visuel en fait, j’ai l’impression. 

Az : Oui c’est ça ! Le podcast c’est le même concept que la télé ou la radio en fond, mais le podcast a ça de mieux qu’il n’y a pas de pub ! Il n’y a pas de coupure.

M : Ah, ça dépend lesquels ! Pas sur le nôtre, mais il y a des podcasts avec des pubs. 

Az : Ça dépend lesquels mais la plupart du temps il n’y a pas de pub, on peut écouter ce qu’on veut, quand on veut et même s’il y a des pubs, on peut les passer. C’est vraiment à la demande ! Si je mets la télé en fond, je ne vais pas choisir quelle émission il y a sur France 2 quand je vais allumer la télé. Je vais être obligée d’écouter ça s’il n’y a rien d’autre qui me plaît. Tandis qu’avec mon téléphone j’ai la liberté de me dire « Aujourd’hui j’écoute de la musique… Et puis en fait non, aujourd’hui j’écoute un podcast ». Et je vais choisir entre le dernier épisode de Fréquence 9 3/4 ou j’ai envie d’écouter une fanfiction sur « Fanatical Fics and Where to Find Them ». Pour moi, le podcast c’est à la fois synonyme de liberté, dans le cadre d’Harry Potter, de magie, et de rentabilisation du temps. Pour revenir sur le côté pratique, vraiment, c’est ça. Et oui, totalement, ça va avec cette idée de « J’ai besoin d’un fond sonore ». Sauf qu’en plus de ça, c’est un fond sonore sur lequel on peut vraiment se concentrer, vu qu’on n’a pas besoin d’images pour l’illustrer et qu’en plus de ça, la tâche sur laquelle on est de base n’est pas une tâche où il faut se concentrer. Parce qu’il ne faut pas faire ses devoirs avec un podcast dans les oreilles ! Soit on rate l’un, soit on rate l’autre. 

M : C’est sûr ! Petit coucou du coup à ceux qui nous écoutent en train de faire leur vaisselle, si c’est le cas, envoyez-nous un petit message ! 

Ax : Envoyez-nous des photos en stories ! 

M : Mais j’ai l’impression aussi qu’avec le podcast, par rapport, par exemple, à regarder… Parce que pareil, maintenant avec le fait qu’on peut regarder des séries et tout ce qu’on veut sur nos smartphones, il y a ce côté très « portable » aussi, dans les transports en commun…etc. Mais avec le podcast il y a un côté très personnel aussi, parce qu’en général on l’écoute tout seul dans notre casque ou nos écouteurs, sauf dans certaines exceptions on peut écouter ensemble un podcast comme on écoute une émission télé mais c’est quand même assez rare je pense, dans les pratiques. Et du coup il y a ce côté très « perso » où les gens qui sont autour de nous ils n’ont aucune idée de ce qu’on est en train d’écouter. J’ai l’impression qu’il y a ce côté là aussi, c’est beaucoup plus personnel que de regarder une série, où peu importe qui passe à côté de nous, il peut voir ce qu’on est en train de regarder, ou lire un livre, tout le monde peut voir ce qu’on est en train de lire… Il y a ce côté-là j’ai l’impression. Là c’est moi qui réfléchit en même temps ! 

Ax : Non mais c’est vrai, il n’y a pas d’intermédiaire visible. Ça vient directement dans tes oreilles. 

M : Et ça crée un côté un peu intime. En plus quand on écoute un podcast régulier on entend tout le temps les mêmes voix, toutes les semaines, tous les mois… Au bout d’un moment on les connaît par cœur ces voix, et c’est assez particulier ! 

Az : Mais c’est le sujet d’une conférence Ted Talks, de Beau York – vous la trouverez sur Youtube si vous voulez – qui parle de comment il est arrivé aux podcasts et pourquoi il y est resté. Il dit notamment qu’il est arrivé sur les podcasts pour les sujets dont ils parlaient, et il est resté pour les voix parce qu’à force de les côtoyer il avait l’impression d’être avec des amis. C’est à dire que les gens du podcast ne le connaissaient pas, mais lui, de les entendre dans une sphère extrêmement privée, justement parce que quand on écoute avec un casque ils sont directement dans nos oreilles, il n’y a pas plus proche en fait… Il disait que le podcast était devenu son moment à lui, qu’il partageait avec des amis qu’il n’avait jamais vus, qu’il ne côtoyait pas mais dans les sujets qu’ils avaient en commun, il se sentait proche d’eux. Donc ça rejoint totalement ce que tu disais : le podcast est extrêmement proche de son public ! 

M : C’est beau ! Justement, pour reparler des podcasts qui sont proches de leur public, n’est-ce pas… Parce qu’il y a en plein de types différents de podcasts, qui créent un rapport différent avec leur public, mais le premier, moi, qui me venait en tête c’est au final les fameux podcasts talk, qui sont des discussions à plusieurs autour d’un sujet, façon un peu plateau radio… Ca peut avoir plusieurs formes, mais il y en a quand même pas mal qui fonctionnent avec des systèmes de segments, de chroniques avec différents animateurs qui se relaient, où le principe c’est une grande place à la discussion assez libre et spontanée, on sent qu’ils suivent un fil mais tout n’est pas scripté, écrit à l’avance. Ce qu’on fait c’est plus ou moins ça, ça dépend, mais on est plus dans un format interview. On n’est quand même pas très loin. Mais à la Gazette, par exemple, le podcast Salut les Sorciers c’est totalement ça. C’est le cas de pas mal de podcasts Harry Potter historiques, dans le sens les plus anciens. Que ce soit anglophone ou francophone d’ailleurs ! Je pense évidemment à Muggle Cast qui est un des tout premiers, la RITM, sur la Gazette aussi, qui est aussi le podcast historique de la Gazette, le Poudcast, qui est quand même aussi un des premiers podcasts… Enfin il est plus récent, mais un des premiers podcasts francophones qui a bien marché. Voilà, c’est tous sous le même format de « talk ». 

Ax : C’est vrai que c’est un format que j’aime beaucoup. J’aime beaucoup la spontanéité des discussions même si on peut retrouver ça dans plein d’autres formats aussi, mais moi le format du MuggleCast c’est là que j’ai découvert les podcasts à l’origine. Je pense sans doute que j’ai écouté la RITM avant, mais moi j’aimais ce côté un peu… J’ai envie de dire un côté un peu fourre-tout, des fois, parce qu’il n’y a pas forcément de lien entre les épisodes, chaque épisode a un thème un peu indépendant. Mais justement, comme on parlait des voix qu’on retrouve, pour le coup c’est vraiment les chroniqueurs et l’ambiance qui créent un fil rouge. Je trouve que c’est ça qui fait aussi qu’on accroche, c’est ce fil rouge, cette fidélité-là, qui se met en place au fil des épisodes. 

Az : Je suis tout à fait d’accord. Moi, de ceux que vous avez cités, la façon dont je suis arrivée aux podcasts c’est par le Poudcast. A part Salut les Sorciers, le Poudcast c’était vraiment le seul que j’écoutais à une époque, avant de découvrir tout le monde des podcasts Harry Potter. Et c’est vrai que c’était cette notion de « un groupe d’amis se réunit et parle d’Harry Potter » – avec plus ou moins de fil, parce qu’il y avait quand même un petit fil conducteur au cas où… Et je trouve que le Poudcast a même mis un step up au moment où ils sont passés en live, donc ils ont fait les podcasts, là bien sûr on peut tout réécouter mais ils ont aussi fait un live avec un chat sur Youtube, et là le média est devenu totalement horizontal ! Un média vertical c’est la télé, la radio… Où il y a un public qui écoute et qui n’interagit absolument pas avec les intervenants, et un média horizontal c’est comme faisait le Poudcast : eux étaient là, parlaient, et nous on était avec eux et on interagissait via le chat et ils regardaient nos messages, et ils pouvaient y répondre, et la discussion continuait avec le public. C’est exactement ce que vous faites quand vous répondez aux mails qu’on vous envoie, ou ce que fait Fréquence 9 3/4 avec le Temps de la Volière qui est consacré aux messages des auditeurs… C’est vraiment le podcast dans toute sa dimension communautaire. En soi, le podcast version talk, je trouve ça super agréable à écouter, parce que c’est vraiment un bon moment entre amis, littéralement.

M : Oui. Et c’est ce genre de podcasts où on se surprend à parler tout seul, à répondre en écoutant, parce qu’on a tellement l’impression d’y être qu’on se met à répondre à voix haute. Et en général il faut mieux être tout seul dans ces cas là sinon la personne à côté se dit « Mais qu’est-ce qu’il se passe ? Ça y est, elle est devenue folle ! ». Un autre format qui pour le coup est beaucoup moins courant, en tout cas dans les podcasts Harry Potter que je connais, c’est les podcast solo, qui sont en général des formats beaucoup plus courts – parce que pour les coup les talk c’est en général au moins une heure, et souvent plus, souvent autour d’une heure en moyenne. Et les podcasts solo sont souvent beaucoup plus courts, et forcément comme c’est tout seul, c’est totalement écrit à l’avance… Ce sont en fait des formats presque de chroniques, pour couvrir une thématique, ou de l’actu… ce genre de choses. J’en connais très peu d’exemples dans le fandom Harry Potter, mais j’en écoute dans d’autres sujets, et c’est vraiment un exercice totalement différent et une expérience totalement différente à écouter. C’est un format assez intéressant ! Je ne sais pas si vous avez un avis, pourquoi c’est aussi peu représenté pour l’instant dans le fandom podcast Harry Potter ? 

Ax : Je m’étais dit que j’écoute des podcasts sur d’autres sujets justement, sur ce format là, et en fait j’ai l’impression que dans le fandom Harry Potter spécifiquement, et beaucoup aussi dans des sujets de pop culture, quand on est sur un format très écrit, et seul, j’ai l’impression qu’aujourd’hui c’est un public qui va plus facilement se tourner vers Youtube. Quelqu’un qui a envie de faire un format comme ça, spontanément je n’ai pas l’impression qu’il va se dire « Je vais lancer un podcast ». J’ai plus l’impression que ça va être Youtube le média de prédilection. 

M : Je n’y avais pas pensé mais oui, je pense que tu as raison. 

Ax : Et du coup je pense que ça joue un peu sur l’absence de format très écrit là-dessus. Après, la vidéo apporte plein d’autres choses ! Justement, tu peux montrer des extraits, des images, tu peux faire des tutos par exemple, plein de choses que tu ne peux pas du tout faire au format podcast. Mais je pense qu’il y a ce côté… Par exemple j’écoute des podcasts de voyage, et il y a beaucoup de gens qui vont raconter leur voyage. Mais j’ai l’impression que si on fait un podcast comme ça sur Harry Potter – par exemple, je raconte ma visite au Studio Tour – tout de suite on va passer à un format vidéo, comme ça on montre aussi des images… Je pense que c’est aussi une question de générations, où la génération Harry Potter est plus à l’aise avec ce format vidéo, et donc c’est un média vers lequel on se tourne plus facilement. Mais c’est juste une supposition ! 

M : Ca se tient ! 

Az : Ça semble très cohérent, surtout que je vous avoue que je connaissais pas du tout le principe de podcasts solo. J’en ai jamais écouté, donc je ne savais pas, je l’ai découvert avec vous. C’est vrai que je le vois mal adapté à Harry Potter, mais maintenant que tu parles de Youtube, c’est vrai que ça ressemble beaucoup à ce que peut faire Vous-Savez-Qui, ou Nini 9 3/4 sur certaines de ses vidéos… Je n’aurais pas du tout imaginé ! Je n’arrive pas vraiment à me figurer un podcast Harry Potter qui serait en solo, tout simplement parce que je vois vraiment Harry Potter comme une communauté. C’est plus simple d’en parler avec quelqu’un que d’écrire un scénario tout seul et de le dire devant un micro. Après pourquoi pas, on ne sait jamais ! 

M : Alors moi j’ai un exemple en tête qui est un exemple Star Wars mais qui est à mi-chemin entre le podcast solo et l’audio-fiction, qui est le prochain type auquel je pensais,  qui est vraiment un podcast où c’est une personne derrière, qui écrit sur un thème, podcast assez court entre vingt et quarante minutes… Mais avec un gros travail après d’habillage, où en même temps il raconte une histoire. C’est des choses qui peuvent se faire sur Youtube aussi, mais ça peut marcher aussi en audio. C’est plus intéressant quand il y a quelque chose en plus que juste le truc écrit, qu’il y a vraiment un habillage… comme sur Youtube au final. Quelqu’un qui va juste faire une vidéo Youtube où il parle face caméra sans aucun habillage, ça peut être intéressant si la personne est vraiment très engageante, mais souvent l’intérêt de Youtube c’est de jouer un peu avec la forme, de montrer des choses, faire un travail de montage… Et c’est pareil sur les podcast solo audio, il y a forcément un habillage musical, de l’ambiance…etc. C’est assez différent. Mais sur les audio-fictions, ce qui les différencie des autres c’est que ça demande en général des compétences de pots-production un peu plus avancées pour l’audio-fiction telle qu’on peut l’imaginer. Parfois ça peut prendre des formes aussi simples que des talks, où c’est juste de la lecture théâtrale, de fanfiction par exemple, parfois avec juste quelques effets sonores, mais ça peut aussi être juste monté comme des podcast talk, juste les voix sans autres effets… En français je n’en connais pas énormément mais c’est vrai que dans l’article que nous a fait Salem – on vous renvoie à l’article qu’a sorti Salem il n’y a pas très longtemps, où elle nous a fait un catalogue de podcasts – elle a fait un recensement de tous les podcasts francophones qui existent sur Harry Potter. J’ai découvert des audio-fictions que je ne connaissais pas, qui ont l’air bien barrées ! C’était chouette de savoir que ça existait. Côté anglophone je n’en connais quasiment pas, à part des podcasts de fanfictions justement, qui lisent des fanfictions. Il y a aussi un autre type qui est lié à tout ça, qui sont les podcasts de jeu de rôle où des parties des jeux de rôles enregistrées, un peu à mi-chemin entre l’audio-fiction, le talk joué… C’est intéressant tous ces formats ! Ce n’est pas le plus représenté mais ça existe. 

Ax : Je pense que mine de rien, l’audio-fiction c’est une fanfiction audio. On a vu une migration importante des fanfictions, même si ça existe toujours et que c’est très fort représenté, aux fanfilms… avec le développement de la facilité d’accès à YouTube, à des logiciels de montage, à des choses comme ça. Et donc, plutôt que de se développer sur le créneau des audio-fictions, ça s’est plus facilement développé sur les fanfilms et les fanfictions vidéos, plus que audio. 

M : Ce qui est presque dommage, parce qu’au final niveau moyen, ça demande encore moins de moyens de faire de l’audio-fiction de qualité, pour peu qu’on tente un peu des effets sonores, des effets d’ambiance…etc. Alors c’est un travail totalement différent que la vidéo, mais là pour le coup au niveau des moyens financiers, c’est quand même largement plus accessible de faire de l’audio-fiction. 

Ax : C’est sûr ! 

M : Les podcasts de fanfiction ça existe quand même, et ça pour le coup c’est pas de la création pour le podcast, c’est vraiment utiliser le matériel fanfiction pour le mettre en podcast. Tu nous a cité déja tout à l’heure « Fanatical Fics and Where to Find Them », qui est vraiment pas mal. A une époque – ils ont été obligés d’arrêter mais il y a avait Potterotica qui était spécialisé dans les fanfictions érotiques qui était génial, qui était hilarant ! Mais bon, Warner Bros. leur est tombé dessus donc ils ont dû changer de sujet. Alix, dans l’histoire de la Gazette il y en a eu un, aussi ! 

Ax : Oui, il y a eu B.E.E.D.L.E… Alors ce n’est pas uniquement la Gazette, c’était quelqu’un du forum de la Gazette qui le faisait si mes souvenirs sont bons. C’était B.E.E.D.L.E… Bande d’Écoute Ensorcelante de Lecture… j’avoue que je ne me souviens plus exactement de la signification de l’acronyme. 

M : On aime bien les acronymes !

Ax : Destinée à des Lectures Envoûtantes… Voilà la réponse. Bande d’Ecoute Ensorcelée Destinée à des Lectures Envoûtantes. Comme ça on pourra faire croire au montage que je m’en souvenais ! 

M : Non, je ne vais pas monter cette partie ! 

Ax : C’était effectivement de la lecture de fanfiction, qui avait été évidemment faite avec l’autorisation des auteurs, mais ça permettait de faire découvrir des fanfictions à des gens qui n’en écoutaient pas ou peu. C’est des projets qui sont extrêmement chronophages ! C’est aussi un format qui existe en littérature de manière générale, il n’est pas du tout spécifique à Harry Potter, il y a des podcasts de lecture d’œuvres littéraires. C’est souvent pas dans leur intégralité, mais avec l’idée de faire découvrir des œuvres inconnues, oubliées… Moi qui aime beaucoup lire, écouter les gens parler de leurs bouquins préférés c’est toujours quelque chose qui me plaît beaucoup ! 

M : Ce qui est drôle, en tout cas je connais pour Fanatical Fics et ce genre de choses, c’est les réactions en direct du panel, parce qu’en général ça se fait à plusieurs, au moins à deux où il y en a un qui lit et l’autre qui réagit, et c’est très très drôle en général ! Surtout sur les fanfictions… parce qu’il y en a qui sont juste magnifiques, hyper prenantes et hyper belles, mais ça peut être juste la réaction genre « Oh, trop bien ! », mais d’avoir en plus à l’écoute les réactions de quelqu’un ça peut être assez drôle. 

Ax : Alors ce n’est pas uniquement Harry Potter, mais dans les fandom, Leakycon… tout ça, moi j’aime énormément Marc Oshiro, qui a un blog Mark Reads, et une chaîne Youtube. Et ils font des lectures commentées d’œuvres de fiction qui sont à mourir de rire. Moi j’en peux plus à chaque fois que je l’écoute parler, c’est vraiment… Pour l’avoir écouté en conférence, il a une façon de s’exprimer et de pointer les situations complètement absurdes de n’importe quelle œuvre qui est absolument incroyable ! Alors ça c’est pour les anglophones évidemment, mais c’est vraiment quelque chose que je recommande vivement. Ça aide à faire passer les mauvaises journées clairement ! Il a fait beaucoup d’œuvres, il a fait récemment tout le Disque-Monde par exemple. C’est des gros chantiers dans lesquels il se lance mais c’est toujours très bien ! 

M : Autre format, qui là est souvent le nôtre à ASPIC, c’est le format d’entretien thématique. Alors là c’est vraiment, j’ai l’impression dernièrement, le format de podcast qui a explosé. Si vous cherchez toutes les célébrités qui lancent leurs podcasts c’est des formats d’interview. En général c’est quelqu’un qui tient son podcast et qui à chaque épisode invite quelqu’un de différent pour parler autour d’un sujet. On fait ça un peu avec ASPIC même si là, par exemple, ça ressemble plus à un talk qu’à une interview, et Potterversity, nos homologues anglophones c’est exactement le même format… C’était le format qu’on a eu aussi à la Gazette sur la série « 20 ans de Fandom », où c’étaient des formats un peu interview-portraits, c’est encore différent mais ça existe un peu dans le monde d’Harry Potter. Voilà, c’était juste pour le mentionner en passant, parce que c’est vraiment un format hyper populaire le format d’interview ! Il y en a beaucoup. 

Et pour finir, sur un format sur lequel on va passer plus de temps, notamment pour la suite de notre discussion, c’est le format le plus courant des podcast Harry Potter. Si vous cherchez un podcast Harry Potter vous avez en gros presque neuf chances sur dix de tomber sur ce format là, c’est des relectures chapitre par chapitre de la saga. Ce sont des talks mais chaque épisode est consacré à un chapitre ou deux, ou un peu plus ça dépend des podcasts… Si on parle dispositif de lecture, c’est clairement un relecture en mode club de lecture, j’ai envie de dire, où on rediscute des chapitres et on relit ensemble la saga. Je sais que MuggleCast avait fait ça assez tôt sur certains tomes même si ce n’était pas leur format de base. Ils avaient fait ça notamment en attendant la sortie du dernier tome, sur le sixième ou quelque chose comme ça… Mais c’est surtout Alohomora, qui est un podcast de MuggleNet, qui a inauguré ce format comme cœur de leur concept. Il existe depuis longtemps maintenant ! Ils ont déjà fini depuis plusieurs années de faire les 7 tomes et maintenant ils font des relectures de chapitres et des épisodes thématiques. Maintenant il y en a des dizaines et des dizaines, pour tous les goûts ! Fréquence 9 3/4 qu’on a cité déjà c’est un de ceux-là. C’est notre plus grand exemple francophone de relecture, pour l’instant en tout cas. 

Ax : Moi ce que j’aime beaucoup avec ce format-là… Bon, il y en a où il n’y a pas vraiment d’angle particulier qui va être proposé. Mais comme maintenant la saga est finie et c’est pour ça qu’il y en a de plus en plus contrairement au tout début, quand MuggleCast ou PotterCast se sont lancés ce n’était pas le cas.. Mais ce que j’aime beaucoup aussi c’est quand il y a un angle, par exemple ce qu’avaient fait Harry Potter and the Sacred Text, où l’idée c’était vraiment d’appréhender, de faire une relecture par chapitre en considérant Harry Potter comme un texte religieux et en l’étudiant vraiment, en l’analysant comme on analyserait un texte religieux. Il y en a eu plein comme ça ! Il y a eu une relecture comme ça sur la politique – Accio Politics!, qui est un podcast de MuggleNet aussi, récemment MuggleNet a fait un podcast avec ce format-là spécifiquement axé sur la théorie de la construction en miroir… 

M : Oui, ça c’est un dérivé d’Alohomora en fait, qui n’est pas accessible, il faut payer pour y accéder à celui-là. 

Ax : Oui c’est pour les patreons seulement. 

M : C’est pour ceux qui soutiennent Alohomora, mais comme ils ont beaucoup parlé pendant leur relecture, ils ont commencé à s’intéresser à la construction en cercle, ils ont lancé une nouvelle série où ils relisent vraiment en même temps les deux chapitres qui se répondent selon cette théorie du cercle… Que les chapitres du 7 répondent aux chapitres du 1er, du 6 au 2e…etc. 

Az : Ce qui est super intéressant c’est que tous ces podcasts, qui pourtant ont la même base qui est de relecture, ont tous quelque chose de différent, outre les présentateurs et les présentatrices, ils ont tous réussi à se trouver un angle de vue. Là, comme tu disais, la vision en miroir de l’œuvre, il y a – je reviens sur elles parce qu’elles me font beaucoup rire – Goblet of Wine qui partent du principe d’ajouter d’ajouter beaucoup de cynisme et d’alcool dans leur vision. Ce n’est pas à mettre dans toutes les mains, c’est pour un public averti et anglophone… Mais il y a aussi Potterless qui est Harry Potter lu par quelqu’un qui n’a jamais lu Harry Potter, et sa vision qui est extrêmement drôle parce qu’on n’a pas de spoil étant donné qu’on le suit dans sa lecture et on voit ses théories qui sont souvent très très drôles sur ce qui va arriver dans la saga… C’est extrêmement intéressant de voir que toutes ces personnes qui font la même chose ont réussi à trouver des angles totalement différents et des angles qui font que même si on écoute trois ou quatre podcasts de relecture, on n’écoute pas du tout la même chose. Il y a des redites, forcément, sur certains points, mais en fonction des connaissances de chacun et des expériences de chacun, on a des podcasts qui vont montrer des points complètement différents de la saga qu’on n’aurait jamais imaginés. Pour Goblet of Wine par exemple, ce sont des britanniques qui le font. Et clairement elles ont un œil de britanniques que nous n’avons pas du tout sur des sujets dont on ne peut même pas se douter ! Comme je disais, apparemment – parce que je ne connais absolument pas la géographie de Grande-Bretagne – le trajet du Poudlard Express n’a aucun sens ! Et je vous avoue que c’est quelque chose que je n’aurais jamais pensé à analyser moi-même. C’est pareil, dès le début elles ont dit « Vous êtes au courant que Harry a été laissé devant une porte en plein hiver en Grande-Bretagne, il est mort ! ». Parce que c’est un bébé ! Et c’est vrai que je n’aurais jamais pensé à regarder les températures qu’il fait au mois d’octobre novembre en Grande-Bretagne dans les environs de Londres. Et c’est super intéressant parce qu’avec elles on a un point de vue britannique qui est assez novateur. Avec Potterless, pour ne citer que ces deux-là, on a le point de vue d’un adulte qui n’a aucune innocence de première lecture qu’ont les enfants. La pluralité des personnes qui le font font que les visions sont totalement différentes et que la relecture n’est jamais la même. On peut se construire énormément d’expériences avec celles des autres. 

Ax : Je voulais juste mentionner un podcast que je trouve assez intéressant sur la notion d’expertise et de ressenti, c’est The Gayly Porphet Podcast, qui est animé par une jeune femme noire queer, et un jeune homme qui est trans, qui font aussi une relecture par chapitres avec vraiment cet angle sur la représentation dans le monde magique, le racisme, l’homophobie et tous ces problèmes-là qui peuvent être repérés ou non dans l’œuvre. Et je trouve que c’est une approche qui est très intéressante ! C’est fait de manière assez amusante et très pertinente en même temps. Je trouve que ça éclaire aussi, ça donne vraiment un regard nouveau. Ils ont une approche très intelligente de la saga à ce niveau-là. 

M : Je suis d’accord ! Mais là on est clairement dans ce que tu nous expliquais, des expertises ordinaires. Consommer tous ces podcasts qui apportent des points de vue différents nous permet de nous rendre compte à quel point chacun se construit son expertise en lien avec son parcours, son background culturel… On a déjà parlé du background culturel des animateurs qui permet de voir des choses auxquelles on n’aurait jamais pensé de notre point de vue de français, ou pour des anglais d’autres points de vue. Je sais que très régulièrement dans beaucoup des podcasts américains que j’écoute, ils se posent pas mal de questions sur le système éducatif britannique, pour essayer d’en apprendre plus sur comment ça se passe vraiment dans les internats au Royaume-Uni, et pour nous aussi ça nous paraît assez exotique ! C’est encore plus intéressant quand il y a des panels qui sont multiculturels, où on a des personnes de différents horizons. On se rend d’autant plus compte des décalages qu’on peut avoir dans nos lectures en fonction de notre background. 

Az : Il y a aussi le fait que… Si jamais un anglais ou un britannique, un américain parle français, en français on a une chance qui est que l’autrice ayant étudié le français et parlant français, on a une compréhension des sortilèges et de l’onomastique – l’étude des noms – et de plein de petites choses qui sont véritablement en français dans l’œuvre ! Je pense notamment à Voldemort, à son nom, qui est très représentatif. Sur le Discord de la Gazette on en avait parlé sur les significations qu’on pouvait y voir. Il y a plusieurs sortilèges qui n’ont pas été traduits… 

Ax : Morsmordre. 

Ax : Oui, morsmordre, justement, pour des britanniques et des anglophones, ce n’est pas du tout naturel de dire le « mordre », le « r ». Quand on les entend le dire, on comprend très clairement que ce n’est pas du tout un mot qui vient de leur langue, ce n’est pas du tout naturel pour eux de le dire. Mais c’est vrai que nous, on a cette chance d’avoir une autrice qui, parlant français, s’est inspirée de notre langue pour mettre du corps à son texte. Nous, en tant que français et aussi en tant que langue latinisante – parce que notre langue vient du latin – on peut beaucoup plus facilement comprendre certaines des références qu’il y a. Tandis que les britanniques et les américains, les anglophones, auront plus de mal. C’est aussi pour ça que c’est très intéressant d’écouter ça dans d’autres langues : d’écouter pour un anglophone les podcasts en français et pour un français des podcasts en anglais, ça permet d’élargir complètement les horizons. Peut-être aussi dans d’autres langues ! Je vous avoue qu’à part l’italien, que je maîtrise à peu près, je ne parle pas d’autre langue donc je ne saurais pas dire, mais si ça se trouve en allemand ou en espagnol il peut y avoir des choses qui sont absolument passionnantes ! 

M : C’est vrai que moi j’ai eu la chance avec SpeakBeasty de faire partie d’un podcast très international où on pouvait se retrouver dans le même épisode entre une britannique, une américaine, une allemande, une française, un brésilien, une australienne, une sud-africaine… C’était vraiment toujours hyper intéressant de confronter un peu ces points de vue-là. Mais c’est vrai que par exemple, j’interagis pas mal avec des fans amies allemandes, et c’est intéressant ! C’est plutôt dans le contexte des Animaux Fantastiques que d’Harry Potter, mais même pour Harry Potter c’est assez intéressant de confronter ces types de visions, de références historiques qu’on ne voit pas de la même manière… 

Ax : Des fois c’est vraiment des choses très anecdotiques ! Moi je me souviens… Je pense que c’est Alohomora, j’ai un doute. Quand ils parlaient des prédictions de Trelawney, où il y a cette scène où Trelawney dit à Harry « Mon pauvre chéri, je pense que vous êtes né en plein hiver » et que Harry répond « Je suis né en juillet » et qu’il y a un peu cette moquerie dans la salle parce que logiquement, pour un petit britannique, juillet ce n’est pas du tout le plein hiver. Mais il y avait cette intervenante qui était australienne et qui disait que pour elle c’était tout à fait logique, parce qu’en Australie, juillet c’est en plein hiver. Elle n’a pas compris la blague ! 

Az : Je n’aurais jamais pensé ! 

Ax : Oui, on peut se dire « Bah oui mais elle se doute bien que ça se passe en Angleterre », mais honnêtement moi je me souviens de lectures enfant et quand on est enfant, même si on sait que ça se passe à Londres, en Ecosse pour Poudlard, on imagine quand même un univers qui est comme chez nous. On n’imagine pas que ce genre de choses changent ailleurs, forcément. Ça dépend à quel âge on le lit ! Moi je sais que Privet Drive, j’imaginais la banlieue la plus franchouillarde qui soit. Il y avait plein de choses comme ça qui me paraissaient absurdes. C’est aussi ce décalage qui est intéressant et qui peut créer des discussions qu’on n’aurait jamais si on était qu’entre francophones, qu’entre britanniques…etc.

M : Une autre chose qui change vraiment, qui fait évoluer nos points de vue et qui est hyper intéressante à confronter, c’est l’âge, les générations et la manière dont on lit ou on relit à différents âges. Forcément dans les podcasts de relecture de fans, à part des gens qui sont vraiment rentrés dans le fandom très tard, il y en a de plus en plus, des fans qui arrivent dans le fandom et qui produisent des podcasts, sont engagés dans les discussions mais n’ont pas grandi avec les livres… Mais on a quand même beaucoup de notre génération qui au final, en relisant aujourd’hui la saga à travers un podcast ou en podcast, on le relit en décalage avec nos premières lectures ou nos dixièmes premières relectures qui sont intervenues entre… ça dépend de nos âges, mais entre huit et dix-huit ans. Ça, ça change pas mal de choses je crois ! 

Az : C’est sûr que le point de vue d’un adulte et le point de vue d’un enfant sont, bien sûr, sur plein de points complètement différents, et à chaque relecture, c’est mon cas. Jusqu’à un moment, maintenant j’ai eu un peu moins de temps, je faisais une relecture par an et chacune de ces relectures m’apportait un petit quelque chose. Trois fois rien, peut-être parfois juste une anecdote ou quelque chose qui me faisait réagir, mais que je comprenais un peu mieux parce que je n’avais plus huit ans, je n’avais plus quatorze ans, j’en avais vingt, et qu’on voit complètement différemment Ombrage quand on a treize ans que quand on en a vingt-deux, ou d’autres personnages, d’autres petites situations… Je pense à quelques points plutôt cocasses : toutes les anecdotes en lien caché, dissimulé avec la sexualité qui parsèment l’oeuvre littéralement du tome 2 au tome 7, qu’on ne voit pas, parce que quand on a huit ans, neuf ans, dix ans, on les reconnaît pas ou on ne les comprend pas, et quand on arrive à un âge plus adulte on se dit « Ah oui ! ». Et c’est là qu’on se rend compte que la saga a été écrite pour des enfants mais elle a aussi été écrite pour les parents le lisent aux enfants et pour que les parents apprécient la lecture, eux-aussi. Un peu comme les blagues qu’on a dans les dessins-animés, qui ne sont absolument pas pour enfants et qui ne font rire que les adultes. Quand on est gamin, on ne les comprend pas ! Il y en a une multitude dans Bob l’Éponge ou dans certains autres dessins-animés de cette génération. On voit que les livres ont tout de même été écrits par une adulte pour des enfants et leurs parents. Le truc c’est que les enfants de l’époque sont les parents d’aujourd’hui, ou bientôt, et notre vision de la saga a évolué en même temps que notre âge. Ça même si on n’a pas lu les livres aux âges précis des héros ! Même si on n’avait pas onze ans quand on a lu le tome un, même si on n’en avait pas seize quand on a lu le six, on a quand même eu cette évolution avec les personnages, en train de se dire « Ah mais là c’est de ça dont ils parlent ! », « Ah mais en fait Rusard ce n’est pas un méchant gars c’est juste qu’il a vraiment vraiment vraiment pas de chance et que c’est quelqu’un qui est à plaindre, en fait ». C’est ce genre de réflexions qui viennent. Il y a beaucoup de personnages qui nous paraissaient antipathiques à l’époque ou dont on n’avait rien à faire, et on se dit plus tard « Mais j’aurais pas aimé être dans sa situation ! ». 

Ax : C’est vrai que le switch entre personnage tragique et personnage comique, c’est assez impressionnant quand on grandit. Moi ça m’avait beaucoup marqué quand j’avais relu le tome 2 il y a quelques années, pour le personnage de Mimi Geignarde. Pour moi c’était un personnage ridicule quand je lisais enfant, c’était littéralement celle qui pleure tout le temps, qui se plaint, qui est tout le temps à se moquer… Avec un regard plus adulte, je vois à quel point sa vie a été horrible, on a banalisé sa mort, on rit de la tragédie qu’elle a vécue ! 

Az : C’est aussi le cas de Trelawney, il y a eu un article qui est sorti récemment sur la Gazette, sur le personnage de Trelawney qui est vue au premier abord comme un personnage comique, mais qui en réalité est un personnage tragique. C’est la Cassandre de la mythologie, c’est un personnage qui a vécu des horreurs et qui prédit la vérité et qui ne la saura jamais ! Pour revenir au passage dont tu parlais sur « Tu es né en plein hiver – Je suis né en juillet », il y a cette théorie qui est connue et qui est aussi dans l’article de la Gazette, comme quoi Trelawney ressent en Harry la part de Voldemort. Voldemort, lui, est né le 31 décembre ou le 1er janvier… 

Ax : Oui, 31 décembre. 

Az : C’est vrai qu’on se dit : est-ce qu’on peut seulement s’imaginer ce que c’est que d’être enseignante, de savoir qu’on connaît son métier parce qu’on n’a pas été engagé par hasard, et elle ne pense pas qu’elle a été engagée parce qu’elle a fait la plus grande des productions… Qu’est-ce que c’est d’être engagée en tant qu’enseignante parce qu’on pense que nos qualifications sont reconnues, et que même nos collègues se moquent de nous et ne portent aucune attention à notre travail et à notre personne ? Ça doit être… L’apogée vient quand Ombrage décide de licencier Trelawney et de l’expulser du château. Sa vie entière est en train de se détruire et on se dit que c’est super triste ! Et quand j’étais gamine, je rigolais parce que la classe de Trelawney, c’est la classe de mon prof d’histoire où je m’ennuie en cours au fond de la classe.

M : C’est sûr qu’il y a vraiment ce grand intérêt dans la relecture adulte, en plus avec d’autres adultes, pour discuter de ces choses-là qui ajoutent ces couches d’interprétation complètement différentes. Ce que j’aime bien aussi c’est l’inverse, c’est les podcasts – j’en connais relativement peu mais ce n’est pas si loin de ceux qui confrontent avec des personnes qui découvrent pour la première fois – qui retournent dans le regard d’enfants. Il y a celui que j’ai découvert grâce à Salem dans son article, c’est « Reading Harry Potter with a Four and a Half Year Old », donc « Lire Harry Potter avec un enfant de quatre ans et demi ». Là, le père lit le premier tome à son petit gamin, qui intrervient régulièrement, avec ses petits commentaires parce que lui connaît déjà par coeur l’histoire, en tout cas il pense la connaître par cœur, et il fait ses petits commentaires, il sait très bien ce qu’il va se passer, et il a tout compris… Et c’est très drôle de revoir là saga à travers des yeux d’enfant qui capte des choses que même nous en tant qu’adultes parfois on a oubliées ! Mais avec le côté très naïf et premier degré des gamins, ils captent des fois des choses qui sont hyper essentielles que parfois, dans la suranalyse, on passe complètement à côté ! C’est vraiment sympa comme expérience de lecture ! 

Az : On peut vraiment tirer de tout le monde, à tout âge et en toutes situations quelque chose de nouveau de la saga. C’est ça qui est puissant ! Et c’est aussi le fait que la relecture d’il y a dix ans ce n’est plus la relecture d’aujourd’hui, avec les questions de société qui ont été très mises en valeur ces derniers temps, avec énormément de points de vue différents, qu’on n’avait pas à l’époque, de personnes qui étaient invisibilisées. Comme le podcast dont j’ai oublié le nom je suis désolée, avec la personne queer… 

Ax : The Gayly Prophet. 

Az : Voilà. The Gayly Prophet qui met en lumière des situations et des visions qu’on n’aurait jamais eues en 2006, en 2007… si il y avait eu des podcasts qui s’attardaient sur la saga, parce qu’à l’époque on n’en parlait pas, ou beaucoup moins ! C’est pour ça que la relecture dans le temps, une relecture faite aujourd’hui, sera toujours aussi intéressante si elle est faite dans huit ans, et elle aura apporté encore plus de choses par rapport à la situation actuelle ! Parce qu’Harry Potter, ça semble assez intemporel. A part pour ce qui est des technologies, où on voit que ça commence à dater maintenant – surtout que c’est censé se passer dans les années 90 -, la saga peut se mettre comme intemporelle. C’est trop intéressant de l’étudier sur ce point de vue là ! 

M : Les deux, en fait ! C’est ça qui est hyper intéressant dans les relectures depuis ces dernières années, très récemment, depuis la fin des années 2010 et début des années 2020, il y a à la fois les relectures qui montrent à quel point il y a des thématiques qui sont hyper actuelles, et qui ne l’était pas autant il y a vingt ans ou quinze ans. Justement, tu parlais des personnages d’Ombrage ou Voldemort, de voir les thématiques politiques avec la situation politique actuelle, ça a changé pas mal de choses dans les relectures… notamment des podcasts américains ces dernières années. D’un autre côté, il y a le Gayly Prophet, Accio Politique ou d’autres, qui à la fois pointent ça, et pointent aussi des choses qui sont datées ! On se dit que mine de rien, il y a des choses qui passent moins bien aujourd’hui, des manières de décrire certains personnages, des manières de décrire certaines relations entre certains personnages, vu qu’il y a eu une très forte évolution ces dix dernières années dans la visibilisation de certaines problématiques sexistes, racistes, grossophobes…etc, maintenant on peut relire la saga en les reconnaissant. On ne les questionnait pas autant pendant nos premières lectures dans les années 2000. Il y a les deux ensemble, c’est assez intéressant ! 

Ax : Je pensais aussi au Protego Cast. C’est sur la question animale, du véganisme, végétarisme…etc, le respect des animaux dans le Wizarding World, qui touche aussi à des sujets qui ont été abordés de manière un peu transversale. Avec la popularisation des chouettes, des hiboux…etc, il y a eu beaucoup de problèmes de fans qui achetaient des chouettes et des hiboux pour faire comme dans Harry Potter. Donc il y a eu quand même beaucoup de sensibilisation à ce niveau-là, que l’association a faite ! En se posant la question pas uniquement dans le fandom, mais dans l’œuvre en elle- même : en quoi les personnages sont respectueux de la nature ou non ? 

M : C’est intéressant le Protego Cast, parce qu’ils ont les deux formats qu’on a cités avant. Il y a à la fois le thématique, donc si vous allez dans la liste des épisodes, c’est des épisodes thématiques, c’est pas des relectures chapitre par chapitre. Mais ils font aussi des lives sur un tome, où on a vraiment la chronologie, on revient sur le déroulement de l’histoire et sur ces choses-là. C’est intéressant de croiser les deux dans ce podcast-là. 

Ax ; Je ne suis pas allée écouter les épisodes récents de Alohomora où ils reparlent des anciens chapitres, mais je fais presque une double analyse à ce niveau-là. En écoutant les anciens chapitres de la relecture, on peut voir aussi ce qu’on pointait du doigt à l’époque par rapport à ce qu’on remarque aujourd’hui, à quel point les préoccupations changent aussi ! On revient beaucoup à ce qu’on avait mentionné dans d’autres épisodes sur le fait d’avoir cette histoire qui est fixée à une époque particulière – ça sera toujours les années 90 – et le rapport qu’on a avec elle nous aide à mesurer à quel point on évolue et à quel point la société change en fonction du regard qu’on porte sur elle. Je trouve que ces relectures-là qui s’étalent depuis plus de dix ans, c’est intéressant de se replonger dedans. 

Az : Ce qui est passionnant aussi, c’est que l’œuvre, la saga Harry Potter fait référence à des faits passés. On pense notamment aux métaphores sur les nazis et la résistance, avec l’Ordre du Phénix d’un côté, Voldemort de l’autre… Il y a une grosse référence à tout ça, une référence au Klux Klux Klan qui est malheureusement encore trop récent et qui existe encore de nos jours, avec les Mangemorts et les habits des Mangemorts qui sont clairement une énorme métaphore. Mais en même temps on voit qu’aujourd’hui, il y a certains échos qui sont totalement présents dans des personnages ! Je parlais tout à l’heure d’Ombrage, mais si on veut développer : Ombrage, elle existe, et elle est partout autour de nous. Et c’est potentiellement, pour moi en tout cas, à force d’avoir entendu des expertises sur ce sujet et des réflexions sur ce sujet, Ombrage c’est pour moi la grande méchante de la saga ! Parce qu’on a un Voldemort qui est un méchant très stéréotypé et très enfantin, qui est celui qu’il faut abattre parce qu’il n’y a pas plus méchant que Voldemort, parce qu’il n’en a que pour ses propres intérêts, parce qu’il est littéralement LE méchant, il a tout du méchant…

Ax : C’est vraiment le grand méchant loup du compte, en fait. 

Az : C’est exactement, c’est LE grand méchant loup ! C’est celui pour qui c’est évident qu’il faut se battre contre lui. Et puis de l’autre côté il y a Ombrage. Ce n’est pas du tout évident qu’il faut se battre contre Ombrage ! Elle présentée toute mignonne, toute minaudante, c’est la personne du gouvernement, c’est celle qui nous aider, nous protéger, c’est elle qui est censée nous enseigner à nous défendre, c’est quelqu’un de bien, c’est quelqu’un pour qui nos parents travaillent… C’est vraiment un personnage supposé gentil, qui a le devoir d’être gentil, et qui se révèle être une personne vicelarde, mauvaise intérieurement, qui n’en a que pour ses propres intérêts, une personne qui va mentir sur toute la ligne ! Et qui va torturer, aussi, elle va torturer Harry de multiples façons avec sa plume. Et on se retrouve dans un cas de figure où la personne qui est censée protéger est celle qui va se montrer dangereuse. Et comment faire quand cette personne-là est la personne qui est en charge ? C’est véritablement une métaphore de tout ce qui pourrait se passer ! Il me semble qu’à l’époque, Rowling s’était inspirée de Margaret Thatcher. Je ne veux pas dire de bêtises mais il me semble que c’est ça…

Ax : Il me semble aussi. 

Az : A l’heure actuelle, c’est vraiment une métaphore de tous les politiques ! Je dis tous en règle générale bien sûr, je ne veux absolument pas faire de clivage ou quoi que ce soit, d’opinions politiques… On voit des gens qui sont au pouvoir et qui sont intouchables, alors qu’on sait qu’ils ont commis des méfaits. On sait qu’ils ont commis des actes qui nous semblent impardonnables, que ce soit du détournement de fond, du harcèlement, des attouchements… Il n’y a qu’à voir le nombre de politiques sur qui c’est tombé. On se dit que ces gens-là sont toujours en poste, on leur donne toujours la possibilité de s’exprimer et on leur donne toujours du pouvoir alors qu’on n’a pas envie que le pays soit gouverné par des Ombrage, parce qu’on a vu ce que ça donnait dans des œuvres de fiction ! On voit ce que ça donne ! 

Ax : Je trouve ça particulièrement intéressant le fait qu’au-delà de son lien avec le gouvernement, Ombrage soit professeure de Défense Contre les Forces du Mal, et qu’elle incarne le Mal et refuse l’enseignement. Refuser de donner les moyens de se défendre pour garder le contrôle, pour garder la supériorité en termes de connaissances techniques, d’influence…, c’est quelque chose qu’on voit aussi dans des sociétés actuelles ! Le refus d’accès à ces connaissances-là pour garder le contrôle sur la population. 

M : C’est vrai que c’est intéressant ces différences entre Voldemort et Ombrage, parce que des Voldemort, il y en a dans le monde réel, des personnes où on ne peut pas ne pas dire qu’ils ne sont pas malfaisants. Ils existent. Mais on ne les croise pas tous les jours ! Et s’élever contre ces personnes-là, c’est des choses à des échelles qui nous dépassent souvent, la plupart d’entre nous. S’élever contre un Voldemort, c’est essentiel mais à notre échelle, souvent, on ne peut faire grand chose. Alors que des Ombrage on en a à des niveaux de pouvoir beaucoup plus bas, partout, et on fait des liens très très directs entre notre lecture d’Harry Potter et notre expérience de première main ! Reconnaître des Voldemort dans l’histoire de l’humanité, oui, on peut le faire, mais en général ce n’est pas des gens avec qui on a déjà été dans la même pièce. Alors que des Ombrage, oui. Et on a dû agir – ou pas, face à des personnes comme ça. Souvent, en tant qu’adulte, oui, mais même déjà au même âge que Harry, au lycée… Moi j’ai eu une prof qui était une Ombrage ! Et d’avoir lu Harry Potter ça m’a fait réagir d’une manière dont je n’aurais certainement pas réagi si je n’avais pas lu Harry Potter. Maintenant, avec le recul, je me dis « Bon, ce n’était pas totalement une Ombrage mais j’ai eu raison d’agir comme je l’ai fait ». Et en même temps, on voit bien, exactement ce que vous disiez toutes les deux, les parallèles qu’on peut croiser à n’importe quelle échelle ! Et surtout à des échelles sur lesquelles on peut agir, et c’est ça toute la différence, je pense. 

Az : Oui, et c’est un personnage très vicieux parce qu’en plus de ça, il faut aussi faire attention à nous, ne pas devenir l’Ombrage de quelqu’un. Il y a peu de risques, bien sûr, à son niveau – à moins qu’on soit vraiment en accord avec notre morale de se dire « OK, je connais la différence entre le Bien et le Mal et je vais choisir le mal », à moins qu’on soit ce genre de personne. Mais on n’est pas à l’abri de se retrouver un jour dans une situation de pouvoir et pour une raison X ou Y, on agit mal au point de blesser une personne. Alors peut-être pas aussi profondément que l’a fait Ombrage, mais comme ta prof, la prof que tu as eue, je ne sais pas si elle était fondamentalement mauvaise mais c’est le genre de comportement où on doit faire attention de ne pas devenir nous mêmes des Ombrage pour quelqu’un. Ça ne signifie pas l’être pour tout le monde, Ombrage c’est vraiment le stéréotype de la pire des manières et c’est souvent ce qu’on voit dans le visage public des politiques. Mais pour ceux qui sont à tous les niveaux, c’est une facette d’eux, Ombrage. C’est aussi un petit rappel, une petite piqûre de rappel : n’essaye pas de te convaincre que ce que tu fais c’est bien quand ce que tu fais c’est mal. Comme quand Ombrage essaye de se convaincre que lancer un Doloris à Harry, ce n’est pas si grave parce qu’elle travaille pour le MInistère et que c’est pour la sécriité du Ministère, C’est avec ce genre de raisonnements qu’on s’est mis à torturer pendant des révolutions, pour la sécruité de tous alors que ça a toujours été prouvé que la torture ne mène à rien. La torture, ça n’apporte pas plus de réponses qu’autre chose. Pour moi, le personnage d’Ombrage mérite vraiment une étude approfondie. Il faut vraiment comprendre Ombrage pour comprendre aussi la société dans laquelle on vit. 

M : Bonne idée d’article pour la Gazette ! Je pense qu’il va falloir plancher là-dessus ! 

Ax : Je vais le soumettre à mon équipe de rédacteurs ! 

Az : Désolée, je leur donne du travail ! 

M : A moins que tu veuilles t’en occuper… 

Ax : Alors mon planning d’articles est bouclé jusqu’au 2024 à peu près ! 

M : Je parlais d’Alizée aussi, qui pourrait se lancer. 

Az : Pourquoi pas ! Je suis en vacances jusqu’à mi-juin… 

M : En tout cas je pense qu’on a donné envie aux auditeurs d’aller écouter des podcasts de relecture, donc si vous êtes francophones, on ne peut que vous encourager à aller écouter Fréquence 9 3/4, si vous êtes anglophones, vous avez l’embarras du choix en fonction de votre sensibilité ! Si vous avez envie de tenter une relecture politique, philosophique, psychologique… Il y a plein de choix ! 

Peut-être qu’on peut revenir justement sur pourquoi c’est aussi couvrant de faire ces podcasts par chapitre ? Il y a aussi un côté totalement pratique, c’est que c’est quand même assez facile à préparer mine de rien. Et à tenir sur la longueur surtout ! Parce que c’est ça le problème des podcasts : lancer un podcast, c’est facile. Le tenir sur la longueur, ce n’est pas si facile ! Et quand on a un objectif de relecture, je pense que ça donne quelque chose qui facilite quand même, de se dire « Bon, on fait à telle fréquence et on sait forcément, prochain épisode, on n’a pas besoin de plus se creuser la tête que ça, on sait qu’on va parler de tel chapitre, on a juste à le relire et à prendre des notes. On n’a pas besoin de réinventer la poudre à chaque épisode ». Je ne sais pas ce que tu en penses Alix, toi qui as l’expérience de première main, comme moi, de programmer des podcasts ? Je vois l’intérêt que ça a ! 

Ax : Je pense que forcément, selon l’angle qu’on traite, il y a évidemment du travail de préparation pour les relectures, mais c’est sûr que ça donne un objectif à long terme qui peut rassurer. On se dit pas « Oh là là, je n’ai pas d’idée ! ». Nous dans notre cas : « Oh là là, on n’a pas d’invité pour le prochain épisode ! ». Il y a moins cette pression-là. Et je pense aussi qu’au niveau des auditeurs, ça change la relation parce qu’on sait qu’on part… Bon après évidemment, ça arrive que les podcasts s’arrêtant avant la fin, mais il y a un côté un peu : on sait où on va. On sait toujours un peu de quoi parlera le prochain épisode. Alors après, évidemment il y a toujours des surprises, des parallèles, des analyses, des blagues qui vont être faites et qui ne sont pas prévisibles – heureusement ! Mais je pense que c’est aussi un moyen de fidéliser plus facilement. 

M : Oui, c’est vrai ! 

Ax : Et ça permet de parler de tout, en fait ! Je pense que c’est un format qui permet d’aborder énormément de sujets sans risquer de tomber dans la digression, parce qu’il y a quand même ce cadre du chapitre qui est à la fois assez précis et en même temps assez large car on peut très vite se dire « Tiens, ça ça fait la préfiguration ». On parlait des podcasts sur la construction en miroir tout à l’heure… Donc je pense qu’il y a ce côté-là, et de manière générale, je pense que comme l’oeuvre littéraire est extrêmement riche – c’est vraiment une oeuvre qui gagne à être relue pour repérer tous les petits détails…etc – c’est quelque chose dans lequel tant qu’auditeur, on a envie de se replonger. On a envie de revoir tout ça ! Parce que la complexité de l’œuvre, la richesse des références historiques, linguistiques… tout ce qu’on veut, font qu’on peut toujours apprendre quelque chose d’une relecture. Il y a un terreau très fertile à ce niveau-là. 

Az : En plus, les podcasts de relecture c’est un très bon moyen de ratisser efficacement la saga ! On sait qu’on lit le chapitre, et on se concentre sur nos notes de ce chapitre et on sait qu’on ne va rien oublier ! C’est un moyen, si on veut parler d’Harry Potter en profondeur et qu’on veut être sûr de ne rien oublier… on sait qu’on va passer par tous les chapitres ! C’est aussi un bon moyen de se dire « J’ai envie d’éplucher à fond la saga donc je vais faire ça ». 

M : Oui. Petite motivation supplémentaire pour ceux qui ne sont peut-être pas trop sûrs de leur anglais, c’est vraiment un super moyen de perfectionner son anglais les podcasts de relecture. Parce qu’au moins on sait de quoi ils vont parler, on peut relire le chapitre avant comme ça on sait quelles vont être les références…etc. Moi je sais que clairement, Alohomora qui a été mon premier podcast dans lequel je me suis vraiment impliquée et que j’ai écouté toutes les semaines, ça a été vraiment mon déclic dans mon progrès en anglais ! Clairement, c’est sûr et certain. Parce que là on a que l’audio donc on ne peut pas faire autrement que de se fier à ce qu’on entend, et ça permet de faire des progrès fulgurants, je peux en témoigner ! Petit bonus. 

Pour conclure, on a cité quand même plein de podcasts mais je voulais qu’on fasse peut-être un petit tour de table sur vos petits chouchous, vos recommandations absolues pour les auditeurs de podcasts dans lesquels se lancer… Relecture ou pas relecture, on peut être plus large sur les podcasts sur Harry Potter. Alizée je sais que tu nous en a mentionné quand même pas mal, si tu voulais en retenir un… 

Az : Alors je ne vais pas citer ASPIC parce que ça fait un peu redondant et je ne pense pas que ce soit très utile ! En tout cas, je sais qu’ASPIC est vraiment très inspirant pour moi. Après, au niveau francophone, c’est vrai que je n’en écoute pas beaucoup : j’écoute ASPIC, Fréquence 9 3/4, Salut les Sorciers et le Poudcast quand il existait encore. Sinon, je l’ai déjà cité plusieurs fois, mais si vraiment je dois en conseiller un c’est Goblet of Wine, tellement c’est drôle à écouter ! Vraiment, elles me font rire et elles me font découvrir un point de vue britannique, comme je disais, qui m’était complètement étranger. Parfois elles partent beaucoup plus loin que la saga et elles se mettent à débattre sur le système scolaire britannique qui est un sujet vraiment tout nouveau, mais je les trouve très intéressantes, très drôles et bien qu’elles soient saoules dans leur podcast – puisque c’est le principe de leur podcast -, elles sont très compréhensibles pour des britanniques ! Pour un Français qui est un peu hésitant sur son anglais, on comprend vraiment très bien ce qu’elles disent. Ça peut paraître paradoxal mais… Franchement, si je dois en conseiller un anglophone, c’est celui-là. 

Ax : J’ai réfléchi, comme on en a déjà cité beaucoup… Peut-être un qui n’a pas été cité et qui a quand même inspiré le projet de ASPIC, c’était Mugglenet Academia / Potterversity, qui est un podcast avec une approche analytique, en anglais. Il a été produit par MuggleNet. Ils ont pas mal évolué sur le format, au niveau des invités, parce qu’il y a eu plusieurs équipes différentes qui se sont succédées, mais voilà, moi ça a vraiment été un podcast qui m’a donné envie de faire le projet ASPIC. Je ne peux pas ne pas le mentionner ! 

M : Avec une grande variété de sujets, donc c’est le type de podcast dans lequel vous pouvez aller picorer, vous n’êtes pas obligé de vous faire un binge-listening, de binger les épisodes. Vous pouvez aller juste piquer les épisodes qui vous intéressent en fonction des sujets, c’est toujours chouette. 

Ax : J’avoue, confession, je crois qu’il n’y a aucun podcast dont j’ai écouté tous les épisodes sans exception. Parce que c’est vraiment le genre de choses où j’oublie où j’en suis, où je commence des choses et puis je ne les finis pas… Il me faudrait un Goodreads ou un Betaseries des podcasts ! 

M : Sur la plupart des applis de podcasts, on peut suivre, on sait le nombre d’épisodes non-lus qu’il nous reste…etc. 

Ax : Oui, mais moi je suis une mamie, je vais sur les sites internet des podcasts pour écouter ! Et toi Marjolaine, ça serait quoi que tu recommanderais ? 

M : J’en ai déjà recommandé pas mal. Évidemment, Alohomora parce que c’était mon premier et que je pense que pour une relecture… Ne soyez pas intimidé par le nombre d’épisodes, c’est un podcast qui existe depuis… j’ai oublié combien d’années… 

Ax : 2011 ou 2012 non ? 

M : Oui, je dirais bien dans les 2012 peut-être. Ils vont approcher leurs dix ans, c’est fou ! Donc voilà, soit vous vous relancez du début pour accompagner une relecture, soit vous regardez dans les derniers épisodes ceux qui vous intéressent et pour vous mettre dedans. Mais sinon, pour rester dans les relectures, puisqu’on l’a un peu évoqué mais ça a pu peut-être paraître un peu wtf pour les auditeurs : Harry Potter and the Sacred Text. Il est vraiment passionnant. Il ne faut pas être rebuté par l’aspect théologique, lecture religieuse. Ce n’est pas du tout… on ne parle pas de religion dedans, on parle juste des outils qui sont utilisés dans les religions pour lire les textes. D’ailleurs, les animateurs, en tout cas dans les premiers épisodes, c’étaient une catholique et un juif, je crois…

Ax : Oui, je crois que c’est ça ! Étudiants en théologie à Harvard, je crois. 

M : C’est ça. Et qui, du coup, parlent des outils qu’ils ont dans les études sur leur propre religion pour lire les textes, faire des méditations sur le texte…, et en sortir des thématiques. C’est très agréable à écouter, c’est très apaisant. C’est vraiment un des podcasts Harry Potter qui a eu le plus de succès aussi, au niveau des podcasts anglophones, ça a été un phénomène ce podcast ! Donc j’invite vraiment ceux qui osent se lancer dans un épisode en anglais à aller jeter une oreille à celui-ci. 

Ax : Pour le coup, ils ne parlent pas du tout vite, c’est très posé comme ambiance. Ce n’est pas trop difficile d’accrocher. 

M : C’est des podcasts où à la fin d’un épisode on est genre « Aaaaah, je me sens bien ». C’est chouette. 

Voilà, on a fait un bon tour sur le sujet, ça fait plaisir de parler de podcasts dans un podcast ! Merci encore Alizée… 

Ax : Oui, merci à toi. 

Az : Merci à vous !

M : On était vraiment touchées de recevoir ton travail, ça nous a fait tout drôle avec Alix pour te dire, et de pouvoir prolonger la discussion en vrai avec toi c’est encore mieux ! On est ravies. 

Az : Ça a été un honneur vraiment, moi qui vous écoute à chaque épisode qui sort, j’étais vraiment très très contente de pouvoir venir avec vous partager un épisode ! 

M : Super ! En tout cas, l’appel est lancé à tous les étudiants qui comme Alizée se sont lancés dans faire des dossiers sur la thématique Harry Potter, envoyez-les nous ! On est ravies d’échanger avec vous à ce propos-là et on est vraiment friands de tout ça. N’ayez pas de syndrome de l’imposteur de vous dire « Je ne suis qu’en licence, je ne suis qu’en master 1, je vais attendre d’avoir soutenu ma thèse pour parler de mon travail »… Non. Vous êtes totalement légitime, vous êtes justement à la frontière entre ces expertises ordinaires et ces expertises en cours de professionnalisation, donc on est ravies d’avoir ces regards-là. 

Ax : Oui, et puis comme on disait, Marjolaine et moi on est des vraies Serdaigle ! On lit des dossiers universitaires au petit-déjeuner, littéralement, ce n’est pas une blague. En tout cas dans mon cas ! Envoyez-nous vos plus belles analyses, ça sera un plaisir de les découvrir. 

Encore merci à Alizée d’avoir été notre invitée, merci à vous de nous avoir écoutées, n’hésitez pas à nous contacter par mail – readaction@gazette-du-sorcier.com -, suivre l’émission sur la page Facebook « L’Académie des Sorciers », sur Twitter @aspic_gds… On nous a demandé sur Instagram : on n’a pas de compte Instagram dédié à ASPIC, mais vous pouvez nous contacter via le compte Instagram de la Gazette du Sorcier, @gazette_du_sorcier. 

M : La sortie des épisodes est relayée sur l’Instagram de la Gazette. 

Ax : N’hésitez pas à laisser un avis sur les plateformes d’écoute que vous utilisez, vous pouvez aussi soutenir l’émission sur Tipeee « Gazette du Sorcier ». Si vous suivez Salut les Sorciers qu’on a mentionné à plusieurs reprises, le podcast a changé de plateforme d’écoute. On est sur Podcloud, vous avez sans doute eu besoin de vous réabonner. Donc si vous ne trouvez pas les épisodes de Salut les Sorciers, que vous avez peur qu’on ait arrêté l’émission, ce n’est pas le cas ! L’émission est toujours en cours, elle est juste sur un flux RSS différent. Vous pouvez aller vous réabonner si ce n’est pas déjà le cas. 

M : Et les derniers épisodes sont vraiment trop chouettes donc si vous ne les avez pas écoutés, allez-y. Il y a quatre épisodes consacrés aux quatre maisons, c’est vraiment super chouette ! 

Az : Particulièrement celui sur Serdaigle. 

M : Évidemment ! 

Ax : Le Gryffondor n’est pas encore sorti mais on les garde pour la fin. On remercie Kalegula qui a composé le générique de ce podcast, d’après les thèmes de John Williams et Patrick Doyle, et Marjolaine qui fera le montage de cet épisode ! A très bientôt pour le prochain épisode de l’Académie des Sorciers ! 

M : Et cher auditeur, n’oublie pas… 

Tous : PASSE TES BUSE D’ABORD ! 

Musique

Chroniqueuses : Marjolaine & Alix
Invitée : Alizée Castagna
Graphisme : Salem

Montage : Marjolaine
Générique : Kalegula, d’après des thèmes de Patrick Doyle et John Williams.
Transcription : Rowenaz

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